lundi 6 octobre 2008

CHAPITRE 3 « BELLE FRANCE DE LA REPUBLIQUE » (5/5)


Didactix, sentant l’état de son vieil ami, lui demande, histoire de lui occuper l’esprit, de leur confectionner un bel étendard magique pour eux aussi. Par chance, cette idée plait à Constitutionnix. Il se sent de nouveau utile. Ils rentrent alors au village et Constitutionnix se met en quête des ingrédients nécessaires pour concrétiser son idée.

Pendant ce temps Syndicaline et Didactix décrivent la situation de crise à tous leurs camarades. Suite à quoi, on s’active avant de se retrouver autour de notre bon druide pour assister à la naissance de l’étendard magique.

En guise d’ingrédients, Constitutionnix demande à Germinalix de lui procurer du charbon sacré de l’Est, du charbon ayant reçu les pleurs et le sang des mineurs. Se sera chose faite. Il demande à Métalurgix de lui fournir une serpe en inox et un flacon d’essences de sueur ouvrière. Ce sera chose faite. Agricultrix ayant toujours avec lui des amphores remplies de terre bénite, de la bonne terre rousse des champs Parisii, il lui en offre une pleine amphore. Plus que le lin sacré tissé par les petites mains des fées de la grande forêt et presque tous les ingrédients de l’étendard magique seront réunis.

Malheureusement personne dans l’assemblée ne dispose de lin sacré. Malheur ! Il manque l’ingrédient essentiel, le tissu vivant pour l’étendard. Comment s’en procurer ?

Constitutionnix cherche une solution. La foule fait de même. Mais le temps passe sans qu’aucune solution n’apparaisse. Alors que le feu sous le chaudron magique s’affaiblit et que le regard de Constitutionnix s’assombrit, voici qu’à l’une des extrémités de l’assemblée, on s’agite.

Constitutionnix, Syndicaline, Didactix et d’autres camarades tournent leurs yeux vers le lieu d’où provient le tumulte. Mais ils ne distinguent que les premiers rangs d’une foule impatiente. Cependant l’agitation se rapproche. Ils distinguent maintenant comme un frémissement au-dessus des têtes. Oui l’agitation se rapproche.

Soudain, nos amis doivent baisser les yeux. Un puissant halo de lumière enveloppe les premier rangs. La foule s’ouvre alors pour laisser passer comme une nuée de lumière floconneuse. Après que les yeux se soient habitués, ils peuvent voir qu’une colonne composée d’une centaine d’infirmières se trouve là, devant eux. Elles portent sur elles des blouses tissées avec du lin sacré.

Didactix reconnaît Blousedhermine, une amie d’enfance, qui dirige la colonne avec trois de ses copines, blousecoquine et Blousalbine. Sans mot dire, elles s’approchent du druide et dignement otent leurs blouses. Nues, elles tendent leurs habits sacrés à Constitutionnix. Ce qu’elle peuvent être sublimes, posant ainsi. De dignes filles de Belle France de la République. Même sans blouses, les nuées de lumière les enveloppent encore.

La foule est totalement hypnotisée, subjuguée par ce spectacle comme si elle etait le témoin d’un mystère osirien, d’une cérémonie réservée à de très hauts initiés. Didactix émerge le premier de cette stupeur collective. Il lance alors à l’assemblée un vibrant ; « camarades ! Haïe d’honneur ! Bas les yeux ! Un genou à terre ! »

La foule s’exécute respectueusement comme Moïse devant le buisson ardent. La colonne d’infirmières repart ainsi, sans mot dire, le port altier, drapée dans la même lumière qui les avait accompagné à l’aller, dans le seul bruissement délicat de leur pas caressant le sol et de leurs cuisses qui se frôlent.

Blousedhermine, Blousecoquine et Bloualbine ferment la marche comme elles l’ouvrirent. C’est alors que Didactix ne peut réprimer plus longtemps un bref regard sur ces buissons aussi ardents que sacrés. Nos trois vestales, non vierges, de Belle France le remarquent. Didactix s’attend à être transformé en statue de sel. Mais au lieu de ça, elles le saluent d’un sourire coquin accompagné d’un petit clin d’œil. Un frisson parcourt l’échine de Didactix, un frisson source de rougeurs et raideurs.

Constitutionnix prend enfin, tous les ingrédients et remercie humblement ses amis. Il les fusionne tous dans son chaudron magique. Après les incantations d’usage, sort du chaudron un bel étendard.

Chaque étendard magique naît comme un esprit dans l’univers des puissances divines. Il naît avec sa volonté propre, ou plutôt avec la volonté profonde de ceux qui l’ont désiré et avec des pouvoirs liés à sa personnalité.

Tout le village assiste à la naissance du bel étendard. Il nait du chaudron et en s’étirant révéle son visage. Tout le monde rit de bon cœur en le voyant. Tout le monde reconnait sa paternité et s’attache instantanément à lui. Il passe de bras en bras. On le caresse tendrement. On lui chante des chansons. C’est l’étendard « de sable au poing fermé et au majeur triomphant de gueules » (Un beau doigt d’honneur rouge sur fond noir).

Lignesix et Locomotrix se proposent de porter les premiers, dés cette journée, l’étendard du village au devant de Blinky. Après une journée de marche, ils arrivent sur le terrain des basses manœuvres de Monseigneur le Bossu, alors que le soir pointe son nez ivre à l’horizon.

Une fois face aux positions missionnaires de l’ennemi disposé en ailes écartées, ils hissent leur grand étendard. Celui-ci se gonfle du souffle du soleil couchant. Notre bel étendard s’emplit de vermeil ainsi que d’une fierté auréolée de gloire. L’étendard en bombant sa voile grandit de plusieurs mesures au point que nos amis commencent à plier sous sa stature.

En réponse, le Blinky de l’étendard adverse, portée par les avant-postes, montre ses crocs. Ses babines se crispent un temps puis tremblent. Il se trouve mis au majeur par notre étendard et cela la trouble. Le trouble l’emporte. Il se met à rire d’angoisse puis baisse la tête, en proie au doute. Les avant-postes voyant leur étendard la mine défaite perdent de leur superbe. Puis une rumeur se lève et se propage, telle une Ola, jusqu’au camp où se bâfre l’état major de Démagogix.

Au son de la rumeur, sans même comprendre ce qui se passe, l’état major frissonne de peur. Un doute les secoue. La fureur du couard les saisit. En bons couards, ils tremblent frénétiquement. Leurs couronnes dentaires éclatent sous les claquements de dents. Leurs implants capillaires tombent sous le stress. Leurs pacemakers jouent de la boite à rythme. Ils jouent le grand air de la « tachycardie. » Agrippés à leurs maroquins, ils attendent que le sortilège cesse…

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