samedi 11 octobre 2008

CHAPITRE 3 « BELLE FRANCE DE LA REPUBLIQUE » (1/5)


« Puisque tel est votre souhait, je vais vous raconter l’histoire de notre mère sacrée », répond le druide, le regard brillant, tout en caressant sa longue barbe.

« Vous savez tous, que Belle France de la République est née dans des conditions difficiles. En des temps de pourpre, d’encens et de sang, son père, le dieu Fraternité, s’éprit de la déesse Raison. Ils devinrent très vite inséparables, attachés l’un à l’autre par les chaînes soyeuses de l’amour. Ils voletaient, dansaient continuellement. Au cours de leurs danses amoureuses et noosphériques, ils conçurent Belle France. Or le problème est que Raison travaillait énormément à cette époque. Elle passait beaucoup de temps sur les routes à éduquer les esprits. Cela lui valu bien des tracas et même quelques mésaventures stressantes pour une future jeune maman. Fraternité faisait tout son possible pour la soutenir mais lui aussi avait beaucoup à faire en cette époque. Tout cela eu des conséquences sur la grossesse. Les derniers mois furent très difficiles. D’autant plus que le bébé se présentait de façon inhabituelle. L’accouchement fut compliqué et douloureux. Les déesses Liberté et Egalité virent au secours de Raison mais rien n’y faisait. L’enfant ne parvenait pas à sortir. C’est alors en ce mois de juillet 1789, que l’on dut pratiquer une césarienne pour que Belle France voit le jour. Fraternité s'évanouit. Raison perdit beaucoup de sang. On eut peur de perdre la mère mais elle se rétablit peu à peu. Voilà pour sa naissance.

On aurait pu lui souhaiter une enfance plus reposante mais ce ne fut pas le cas. Belle France dû grandir dans le tumulte. Ses parents habitaient une copropriété divine qui portait le nom d’Europe de Vienne. A l’époque la mode chez les dieux était de vivre en collectivité dans des immeubles construit un peu rapidement. C’était un immeuble d’une vingtaine de logements séparés en deux ailes. Une aile Ouest et une aile Est. La qualité de la construction n’était pas géniale. Les cloisons étaient fines et fragiles et l’on entendait tout ce qui se passait chez les voisins. Or à cette époque, ça s’engueulait pas mal. Les temps étaient querelleurs et les crises fréquentes. Ainsi Belle France du grandir au milieu des cris de la collectivité. Elle en retira une tendance facile aux migraines ophtalmiques, la rendant un peu cyclothymique. Cependant, cela ne l’empêcha pas de devenir une belle enfant espiègle, curieuse et intelligente. Puis de devenir une belle jeune femme aux formes généreuses. Une jolie chevelure châtain lui courait sur le visage, soulignant son superbe regard brun.

Son cousin Germain, en pleine adolescence lui aussi, n’arrivait pas à décrocher ses yeux bleus des formes harmonieuses de sa cousine. Le désir brûlait son jeune esprit immature. Il tenta donc de séduire sa cousine. Par contre il le fit comme tous les adolescents mâles, même divins. Chaque fois qu’il la croisait dans les couloirs de l’immeuble, il lui tirait les cheveux. Belle France répondait en lui donnant des coups de pieds dans les tibias et en courant. Néanmoins elle n’était pas dupe. Elle était consciente de l’intérêt que lui portait son cousin. D’ailleurs elle n’était pas insensible à son charme. Pour Germain elle lui semblait complètement déconcertante. Un jour, elle lui souriait. Le suivant, elle le tançait du regard et se moquait de lui. Ce régime de douches calédoniennes (écossaises) finit par agacer et frustrer Germain.

Un soir, blessé et lassé de l’intempérance gallo-romaine de Belle France, Germain, entraîné par des copains fit le tour des bars divins, « Au Walhalla », « chez Ambroisie », « Hydromel Immortel », histoire de noyer son malheur dans le schnaps, entre autres. C’était un soir noir comme le charbon. Alors qu’il rentrait bien imbibé, il prit l’allée des Ardennes et passa ainsi sous la fenêtre de Belle France. Celle-ci n’ayant pas sommeil, regardait par la fenêtre les nouvelles étoiles éclairées au gaz cosmique. Elle était de bonne humeur et voyant son cousin, elle sortit à sa rencontre afin de le saluer. Germain, la voyant arrivé, fut surpris et recula d’un pas mal assuré comme s’il s’agissait d’une réaction instinctive devant cette image obsédante qui le rongeait.

Belle France, bien que joyeuse, remarqua très vite l’état lamentable dans lequel se trouvait son cousin et ne pu s’empêcher de le sermonner vertement. Les reproches de Belle France étaient la goutte de cervoise qui faisait déborder la corne à boissons. Ils résonnaient dans la tête de Germain comme des coups de canon, les questions de la Sainte Inquisition. Pris de folie, Germain se jeta de rage sur Belle France. Il la gifla et commençait à déchirer son chemisier. Belle France se débattait, lui demandant d’arrêter mais Germain n’entendait rien. En lui mordant le petit doigt, elle réussit à se dégager de ses griffes d’aigle. Germain se retrouva un long moment paralysé par la douleur de la morsure et surtout par l’image de sa cousine en larmes, la poitrine dénudée. Belle France pleurait de rage et lui criait « pourquoi as-tu fait ça ? Pourquoi ? » Elle le giflait, lui tambourinait le torse sans cesse.

Germain revint à lui. Il était en colère contre lui-même, culpabilisant, mais aussi contre cette déesse qui le rendait fou. Il finit par saisir le bras de Belle France qui tentait de le frapper encore une fois et la repoussa violemment, la projetant ainsi à terre. Puis avant même qu’elle n’atteigne le sol, il partit en courrant, pour la fuir. Belle France s’abattit lourdement sur le sol, le bas du dos heurtant un rocher. Elle saigna abondamment. C’est cette nuit là qu’elle perdit l’usage de ses reins.

vendredi 10 octobre 2008

CHAPITRE 3 « BELLE FRANCE DE LA REPUBLIQUE » (2/5)


Ce qu’ignoraient Germain et Belle France, c’est que la scène avait eu un témoin. Un témoins qui avait assisté à tout cela avec un mélange de sentiments. La peur qu’elle ressentît pour eux s’était mêlée à une sorte d’intérêt malsain et à un détachement mélancolique, souvent remarqué chez ce personnage. Il s’agissait de Jolie Princesse d’Avalon, très étrange, à ce que l’on dit. Chose qui lui viendrait de son ascendance. En effet, elle est l’un des rares dieux à avoir du sang elfique dans les veines, contrairement aux autres dieux habitant « Europe de Vienne » qui furent créés par l’être suprême à partir d’essences humaines. Différente des autres divinités, on la craignait ou on l’évitait dans l’immeuble, en même temps qu’on se surprenait à admirer cette beauté d’albâtre. Ce faisant elle se retrouvait ainsi condamnée à vivre sur une île affective, sans pouvoir toucher ni les côtes, ni les cœurs des autres divinités, assistant dans son coin aux amours naissants des autres dieux et au mûrissement des fruits de ces amours.

Bien évidemment, une telle malédiction ne pouvait que produire des frustrations et de la mélancolie. Ce à quoi s’ajoutait chez elle une certaine aigreur et des tentations perfides à l’encontre de ses voisins, aussi noble fut elle par ailleurs. Tout cela détermina, du coup, et alors qu’elle grandissait tout comme les autres jeunes divinités, deux de ses passe-temps préférés.

Tout d’abord voguer sur les océans à la recherche de côtes charnues à caresser et de divinités qui la comprendraient enfin. Ensuite à jouer de ses charmes étranges pour semer la zizanie dans l’immeuble, à chaque fois qu’elle revenait de voyage et s’ennuyait un peu.

C’est donc elle qui assista, à travers la fenêtre de sa chambre plongée dans l’obscurité, aux déchirures amoureuses entre Belle France et Germain. De quoi lui donner des idées.

Suite à cet épisode dramatique, les sentiments entre Belle France et Germain passèrent de l’amour névrosé à la haine avec l’attirance restant pour dénominateur commun entre ses deux sentiments.

Puis vint le temps des études. Germain partit dans une Académie militaire comme beaucoup de jeunes dieux de son époque. Belle France choisit quant à elle de faire des études d’ethnologie ethnocentriste, assez en vogue, aussi à l’époque. Aussi ils s’évitèrent pendant quelque temps.

A la fin de leurs études, ils revinrent dans l’immeuble familial. Jolie d’Avalon qui s’ennuyait ne trouva rien de mieux que d’organiser une petite soirée spéciale voisinage sur le thème du Maroc. Elle profitait de l’absence de tous les parents qui étaient partis faire de la randonnée pédestre chez oncle Zeus dans le mont Olympus. Tous les jeunes dieux acceptèrent. Rendez-vous fut donné ver 19 heures. Le point de rencontre était l’appartement de Jolie d’Avalon mais consigne était donnée de laisser toutes les portes d’appartement ouvertes histoire de pouvoir déambuler dans les couloirs et les appartements de tous les dieux Bien évidemment Belle France et Germainn qui ne s’étaient pas revus depuis longtemps, furent invités. Par conséquent ça na pas raté !

A 19 heures tout le monde était presque arrivé. Il ne manquait plus que Belle France. Elle arriva à 19H04 aux bras de Romain qui s’était laissé convaincre par elle de venir. Le sang de Germain qui méprisait Romain ne fit qu’un tour. Son humeur vira au très sombre. Le sang lui battait les tempes et les joues au point que les cicatrices de son visage, qu’il avait gagnées lors de duels de lames à l’académie, s’ouvrirent. Son visage se couvrit de sang bleu.

Romain se sentit gêné pendant que Belle France regardait Germain avec mépris. Le regard torve de Belle France cinglait le cœur de Germain. Jolie d’Avalon se délectait de ce spectacle tout en conservant le masque de l’indifférence. Germain ne tint pas longtemps. Il se rua sur le couple de circonstance, éjecta Romain d’un violent coup d’épaule et gifla Belle France tout en la traitant de « salope ! »

Celle-ci encaissa le coup sans broncher puis lui décocha un violent coup de pied retourné, sauté en pleine mâchoire qui envoya Germain s’étaler tête la première sur un beau canapé cuir fait par Weymar, un esprit au service des dieux. Le cuir se déchira. La stupeur fut générale. Belle France avait appris le Viet Vo Dao, un art martial, lors d’un voyage chez des divinités indochinoises. Germain sortait la tête du canapé le souffle coupé tout comme Belle France qui s’était froissé un muscle en donnant son coup de botte sécrète. Eh oui ! Même les dieux ont besoin de s’échauffer correctement avant un combat. Il était 19H29. Le tumulte de l’appartement avait gagné les couloirs de l’immeuble et Belle France ainsi que Germain retrouvaient leurs esprits.

Jolie d’Avalon se trouvait un peu gênée par cette situation hors de tout contrôle. Elle ne sauvait que faire. Le tumulte s’étendait de minute en minute.

Germain insultait à tout va, provoquait tout le monde en duel. Il entra dans une colère brune quand quelqu’un lui déchira sa jolie veste de chez Dantzig. Il ne savait qui avait osé lui déchirer son beau costume d’apparat. Il lui fallait du coup se défouler sur quelqu’un. Il trouva rapidement sa victime.

Benlevy, un grand esprit, serviteur de l’être suprême s’était gentiment proposé d’apporter de la musique et des spécialités orientales. Germain le voyant arrivé se déchaîna sur Benlevy, qu’il détestait pour ses qualités, sans que Benlevy n’ait eu le temps de comprendre ce qui lui arrivait.

Germain enchaîna les coups de titans entraînant Benlevy dans le couloir. Les coups étaient terribles. Ils résonnaient comme du cristal que l’on déchire. Personne n’osait s’interposer. Chacun cherchant plutôt à éviter les éclairs que Germain lançait tout autour de lui. Germain laissa Benlevy gisant dans le couloir, quasi anéanti.

Sa rage n’étant pas tarie, il retourna dans l’appartement de Jolie d’Avalon s’attaquer à tous en même temps. D’où pouvait provenir cette fureur démentielle. D’une main, il tenait Belle France par la gorge. L’autre main s’abattait sur tout le monde. Jolie d’Avalon couru alors vers la fenêtre et appela les voisins de l’immeuble d’en face à l’aide. Ceux-ci se réveillèrent et s’apprêtaient à intervenir.

Alors que les cris devenaient des rugissements et que les éclairs de Germain secouaient jusqu’aux fondations de l’immeuble, l’inattendu se produisit.

Tous les parents étaient partis chez oncle Zeus, sauf la grand-mère qui était restée alitée suite à une surprenante rougeole. Il s’agissait de grand-mère Parouskaya qui habitait l’aile Est de l’immeuble. Elle fut réveillée en plein sommeil réparateur par tout ce tumulte en même temps que se réveilla avec elle son caractère ursidé. Aussi elle partit rouge de colère, corriger tous ces jeunes dieux irrespectueux, après avoir pris son bon gros rouleau à pâtisserie.

Germain s’agitait encore comme un vilain diable. Le voyant, elle se rua sur lui et lui molli les genoux d’un bon coup de rouleau à pâtisserie. Les voisins des immeubles alentour arrivèrent eux aussi. Tous ensemble, ils calmèrent le Germain. Fin du drame.

jeudi 9 octobre 2008

CHAPITRE 3 « BELLE FRANCE DE LA REPUBLIQUE » (3/5)


S’en suivirent de grandes discussions afin de dénouer les malentendus et pacifier la situation. Des divinités guérisseuses soignèrent tout ce divin monde. L’une de ces divinités guérit même lors de cette occasion, grâce à une nouvelle technique, les reins meurtris de Belle France qui en récupéra l’usage.

Germain dessaoula peu à peu. Au fur et à mesure qu’il prenait conscience de ses actes, sa conscience protesta si fort qu’il faillit en être brisé de culpabilité. Il ne savait pas comment faire pour réparer tous les méfaits monstrueux qu’il avait causés. Ses yeux s’embuaient et on put le voir tomber soudain aux pieds de Belle France, lui implorer son pardon, lui dire qu’il l’aimait à en haïr tout le reste du monde, qu’il n’avait jamais voulu lui faire du mal. Germain pleurait. Belle France fondit elle aussi en larmes. Le médaillon protecteur qu’elle portait autour du cou, qui renfermait l’esprit de l’orgueil latin, s’ouvrit et laissa s’évanouir une petite nuée magique. Belle France s’avouait enfin les sentiments qu’elle avait pour Germain. Ils tombèrent l’un dans les bras de l’autre, se confondant en excuses et en baisers. Décidément, entre eux deux, c’est fusionnel.

Quelque temps plus tard, nos deux tourtereaux décidèrent de s’unir devant les aïeux du Panthéon indo-européen. Pour célébrer la noce, ils choisirent l’oncle Vulcain, le dieu du charbon et de l’acier. La cérémonie fut sobre mais émouvante.

Dans son coin, Jolie d’Avalon était heureuse que cela se finisse ainsi mais si elle vivait encore plus mal son isolement affectif. Elle n’avait même plus de nouveaux horizons marins à explorer afin de compenser un peu. Ce faisant, elle restait toute la journée enfermée dans son appartement. Elle s’occupait de moins en moins du peuple humain dont elle était l’esprit tutélaire. Elle laissait son jardin à l’abandon. Ses pommiers étaient beaucoup moins chargés en fruits goûteux. Elle restait là à observer l’amour fertile des autres divinités et surtout celui de Belle France et Germain. Des enfants issus de leur union s’incarnaient chez les deux peuples dont ils avaient la garde. C’est ainsi que l’aigreur reprit progressivement le contrôle de l’esprit de Jolie d’Avalon dans lequel s’esquissait déjà des stratagèmes de zizanie.

Fort heureusement cela n’échappa à aucun observateur attentif et surtout pas à nos deux amoureux. Alors qu’ils discutaient, après un moment intime, des événements passés, ils se demandèrent ce qu’ils allaient bien pouvoir faire de jolie d’Avalon. Il devait bien y avoir un dieu avec qui la caser. Elle était quand même loin d’être vilaine et il devait bien y avoir une solution à sa malédiction, se disaient Belle France et Germain. Nos deux complices se regardaient tout en réfléchissant à la question.

Soudain, un éclat coquin éclaira simultanément leurs deux regards. « Ça pourrait être sympa », se dirent-ils. Et ni une, ni deux, Belle France et Germain s’en allèrent voir Jolie d’Avalon pour lui proposer un plan à trois. Nos deux amants avaient déjà tout essayé en sexualité divine à deux et Belle France avouait avoir rêvé à plusieurs reprises qu’elle mordillait les petits seins durs de Joli d’Avalon. Elle imaginait l’odeur ambrée de son intimité. Germain, lui, s’avouait excité par cette beauté froide, par son port altier, une certaine fragilité, sa chevelure délicatement rousse et surtout sa peau étonnement blanche, un blanc fluorescent comme du lait de licorne. Il rêvait de la caresser longuement et de la dégeler sous les coups de boutoir.

Jolie d’Avalon resta bouche bée. Elle rougissait vivement à mesure que sa bouche se refermait. Elle ne su pas quoi répondre. Personne n’avait jamais osé l’aborder ainsi. Belle France ne lui laissa pas le temps de se perdre dans son trouble. Elle s’approcha d’elle, lui caressa le visage puis ses longs cheveux jusqu'aux seins sur lesquels elle s’attarda délicatement.

Jolie d’Avalon frissonna sans pouvoir se contrôler et se laissa entraîner dans son propre appartement par nos deux amoureux.

Mes enfants, la suite fut d’un rare torride. Je vous laisse d’ailleurs imaginer cette suite. Le ménage à trois se mit en place. On créa même un passage entre l’appartement de notre couple et celui de Jolie d’Avalon qui gagna en joie de vivre.

Néanmoins elle se savait inféconde. En l’état actuel des sciences supranaturelles et divines, elle ne peut pas avoir de descendance. Ceci explique que parfois encore, ses vieux démons la saisissent, et qu’elle offre alors à Belle France et à Germain de grandes crises de nerfs ou de jalousie. Toutefois notre couple s’y est habitué. Voilà mes enfants», conclut Constitutionnix.

« Houa ! Oh ! Quelle histoire ! » S’exclament Tanguix et ses amis. Merci beaucoup constitutionnix.

« Nous aimerions bien savoir comment tu peux être au courant de tout cela mais je suppose que tu ne diras rien à ce sujet » conclu Tanguix.

« Tout juste mon jeune ami ! » ponctue le druide.

mercredi 8 octobre 2008

CHAPITRE 3 « BELLE FRANCE DE LA REPUBLIQUE » (4/5)


Ils continuèrent après cela à discuter pendant un certain temps, jusqu’au moment où les sucettes et autres friandises leur vinrent à manquer. Ce fut le moment où ils retournèrent se coucher après avoir saluer respectueusement Constitutionnix.

Constitutionnix décide lui de rester encore quelques instants tout seul, pensant à la beauté de Belle France de la république.

Puis il se retire pour tenter de dormir un peu. Un échec. Pas moyen de se débarrasser de cette boule au ventre qui le tenaille. Rien n’y fait. Il sent des mauvaises ondes en trop grand nombre. Il sent les forces de Dark Speculator grandir et ses armées gronder dans les entrailles boueuses des terres du fief du Baron Wendelium.

Il a raison car la tourbe froide du côté d’Argentocrate et de Devisesdurum va bientôt lâcher sa fureur. Vont-ils pouvoir y résister ?

Pendant la nuit, qu’il aura fort agitée, Constitutionnix connaîtra toutefois un court moment de bonheur. Dans un bref rêve, Belle France vient lui déposer un doux baiser sur le front, en lui disant que seul le voyage compte, de faire ce pour quoi nous somme faits et qu’il ne doit pas s’inquiéter pour le reste. Cette douce apparition calme un peu son sommeil turbulent, mais malheureusement ce n’est que trop peu. Ses entrailles se tordent et le brûlent. Il n’est pas le seul.

Pendant cette nuit, Staracademix fait lui aussi trois rêves étranges.

Il rêve d’abord d’un plateau parsemé de monticules de pierres, des gros et des petits. Des gens vont et viennent prenant des pierres dans les petits monticules pour les placer sur les gros tas de pierres.

Il rêve ensuite d’une plaine parsemée de tertres aux reflets dorés. Ces tertres se transforment en tas de fumiers nauséabonds et purulents où se mettent à pousser subitement de magnifiques fleurs.

Il rêve enfin d’une vaste prairie ensemencée de blé. De superbes gerbes en sortent et grandissent jusqu’à ce qu’une nuée de criquets s’abattent dessus. Alors qu’ils ravagent les champs de blé, de grands et majestueux corbeaux blancs fondent sur les criquets et les dévorèrent tous.

Staracademix se réveillera en sursaut à la fin du troisième rêve pour ne plus fermer œil de la nuit tant il cherchera une explication à ses songes.

La nuit se passe ainsi. Au matin, le Soleil réussit péniblement à déchirer les coutures de l’horizon. Accompagnant du regard ce geste solaire, Constitutionnix sent se rependre, de derrière le rideau nocturne, des vibrations maléfiques. Des vibrations qu’il reconnaît très vite. « Non, pas elle ! » s’écrie-t-il.

BadBercix le Grix, sûr de lui et sans même attendre la bataille, vient de sortir de sa Manche, nom que porte son chaudron magique, un joker supplémentaire. À l’évidence, il s’est allié avec la très vilaine sorcière aux tâches de roussi sur la figure. Il s’est allié avec Thatcheria la Vilaine, fille de Mordred le Grizoux, le mauvais esprit de la Tourbe des brumes.

Constitutionnix comprend maintenant le malaise de la nuit passée. Son corps avait voulu le prévenir de cette redoutable présence. C’est que Tatcheria la Vilaine a déjà de grands passifs à son actif. Elle a semé la calamité dans les terres de brume. Telle une vulgaire sauterelle, Tatcheria la Vilaine a ravagé les pommiers du joli jardin de la princesse Avalon.

Contitutionnix voit la scène comme s’il y était. Thatcheria la Vilaine s’approche de BadBercix en psalmodiant de sa voix de vieille sorcière, les yeux exorbités, sa vieille rengaine « brisez-les, cassez-les ! Cassez-les, brisez-les ! Et laissez-les pourrir sur la grève ! »

Au même moment, à quelques lieues du village, dans une morne plaine jusque là joyeuse, retentit le son du cor de Monseigneur le Bossu du Poitou, ce qui alarme les vigies de notre bon village.

Des armées pleines de hargne, chauves et droites dans leurs bottes sortent du fort « Fondepensium » et s’avancent en ordre de bataille. Aux premiers postes se dressent leurs étendards. Deux d’entre eux impressionnent plus particulièrement nos amis, partis en reconnaissance avec les vigies du village.

Celui de Monseigneur le Bossu « d’azur bretessé au Blinky de gueules » (bleu maison, crénelé sur les bords, décoré d’un vilain fantôme-pacman rouge).

Celui du Baron Wendelium stupéfie Constitutionnix. A l’évidence, le Baron a réussi son pari. Aux premiers postes s’élève en effet l’étendard « de gueules à trois marteaux d’or » (trois marteaux d’or sur fond rouge). Ni plus, ni moins que l’étendard maléfique fabriqué par les filles des forges. Un fléau d’armes horrifique qui ne demandait qu’à être réveillé et qui demande maintenant à boire du sang vigoureux et pas trop cholestérolique de travailleur.

L’étendard maléfique, Thatcheria, Televisium occupé, cela fait décidemment beaucoup trop. Par-dessus tout ça, le village qui se trouve désormais cerné, isolé, et Constitutionnix qui n’a plus tous les ingrédients nécessaires pour préparer la potion magique. Une catastrophe. Sans oublier que ses pouvoirs magiques sont encore bien trop diminués pour tenter quelque chose. Il culpabilise...

lundi 6 octobre 2008

CHAPITRE 3 « BELLE FRANCE DE LA REPUBLIQUE » (5/5)


Didactix, sentant l’état de son vieil ami, lui demande, histoire de lui occuper l’esprit, de leur confectionner un bel étendard magique pour eux aussi. Par chance, cette idée plait à Constitutionnix. Il se sent de nouveau utile. Ils rentrent alors au village et Constitutionnix se met en quête des ingrédients nécessaires pour concrétiser son idée.

Pendant ce temps Syndicaline et Didactix décrivent la situation de crise à tous leurs camarades. Suite à quoi, on s’active avant de se retrouver autour de notre bon druide pour assister à la naissance de l’étendard magique.

En guise d’ingrédients, Constitutionnix demande à Germinalix de lui procurer du charbon sacré de l’Est, du charbon ayant reçu les pleurs et le sang des mineurs. Se sera chose faite. Il demande à Métalurgix de lui fournir une serpe en inox et un flacon d’essences de sueur ouvrière. Ce sera chose faite. Agricultrix ayant toujours avec lui des amphores remplies de terre bénite, de la bonne terre rousse des champs Parisii, il lui en offre une pleine amphore. Plus que le lin sacré tissé par les petites mains des fées de la grande forêt et presque tous les ingrédients de l’étendard magique seront réunis.

Malheureusement personne dans l’assemblée ne dispose de lin sacré. Malheur ! Il manque l’ingrédient essentiel, le tissu vivant pour l’étendard. Comment s’en procurer ?

Constitutionnix cherche une solution. La foule fait de même. Mais le temps passe sans qu’aucune solution n’apparaisse. Alors que le feu sous le chaudron magique s’affaiblit et que le regard de Constitutionnix s’assombrit, voici qu’à l’une des extrémités de l’assemblée, on s’agite.

Constitutionnix, Syndicaline, Didactix et d’autres camarades tournent leurs yeux vers le lieu d’où provient le tumulte. Mais ils ne distinguent que les premiers rangs d’une foule impatiente. Cependant l’agitation se rapproche. Ils distinguent maintenant comme un frémissement au-dessus des têtes. Oui l’agitation se rapproche.

Soudain, nos amis doivent baisser les yeux. Un puissant halo de lumière enveloppe les premier rangs. La foule s’ouvre alors pour laisser passer comme une nuée de lumière floconneuse. Après que les yeux se soient habitués, ils peuvent voir qu’une colonne composée d’une centaine d’infirmières se trouve là, devant eux. Elles portent sur elles des blouses tissées avec du lin sacré.

Didactix reconnaît Blousedhermine, une amie d’enfance, qui dirige la colonne avec trois de ses copines, blousecoquine et Blousalbine. Sans mot dire, elles s’approchent du druide et dignement otent leurs blouses. Nues, elles tendent leurs habits sacrés à Constitutionnix. Ce qu’elle peuvent être sublimes, posant ainsi. De dignes filles de Belle France de la République. Même sans blouses, les nuées de lumière les enveloppent encore.

La foule est totalement hypnotisée, subjuguée par ce spectacle comme si elle etait le témoin d’un mystère osirien, d’une cérémonie réservée à de très hauts initiés. Didactix émerge le premier de cette stupeur collective. Il lance alors à l’assemblée un vibrant ; « camarades ! Haïe d’honneur ! Bas les yeux ! Un genou à terre ! »

La foule s’exécute respectueusement comme Moïse devant le buisson ardent. La colonne d’infirmières repart ainsi, sans mot dire, le port altier, drapée dans la même lumière qui les avait accompagné à l’aller, dans le seul bruissement délicat de leur pas caressant le sol et de leurs cuisses qui se frôlent.

Blousedhermine, Blousecoquine et Bloualbine ferment la marche comme elles l’ouvrirent. C’est alors que Didactix ne peut réprimer plus longtemps un bref regard sur ces buissons aussi ardents que sacrés. Nos trois vestales, non vierges, de Belle France le remarquent. Didactix s’attend à être transformé en statue de sel. Mais au lieu de ça, elles le saluent d’un sourire coquin accompagné d’un petit clin d’œil. Un frisson parcourt l’échine de Didactix, un frisson source de rougeurs et raideurs.

Constitutionnix prend enfin, tous les ingrédients et remercie humblement ses amis. Il les fusionne tous dans son chaudron magique. Après les incantations d’usage, sort du chaudron un bel étendard.

Chaque étendard magique naît comme un esprit dans l’univers des puissances divines. Il naît avec sa volonté propre, ou plutôt avec la volonté profonde de ceux qui l’ont désiré et avec des pouvoirs liés à sa personnalité.

Tout le village assiste à la naissance du bel étendard. Il nait du chaudron et en s’étirant révéle son visage. Tout le monde rit de bon cœur en le voyant. Tout le monde reconnait sa paternité et s’attache instantanément à lui. Il passe de bras en bras. On le caresse tendrement. On lui chante des chansons. C’est l’étendard « de sable au poing fermé et au majeur triomphant de gueules » (Un beau doigt d’honneur rouge sur fond noir).

Lignesix et Locomotrix se proposent de porter les premiers, dés cette journée, l’étendard du village au devant de Blinky. Après une journée de marche, ils arrivent sur le terrain des basses manœuvres de Monseigneur le Bossu, alors que le soir pointe son nez ivre à l’horizon.

Une fois face aux positions missionnaires de l’ennemi disposé en ailes écartées, ils hissent leur grand étendard. Celui-ci se gonfle du souffle du soleil couchant. Notre bel étendard s’emplit de vermeil ainsi que d’une fierté auréolée de gloire. L’étendard en bombant sa voile grandit de plusieurs mesures au point que nos amis commencent à plier sous sa stature.

En réponse, le Blinky de l’étendard adverse, portée par les avant-postes, montre ses crocs. Ses babines se crispent un temps puis tremblent. Il se trouve mis au majeur par notre étendard et cela la trouble. Le trouble l’emporte. Il se met à rire d’angoisse puis baisse la tête, en proie au doute. Les avant-postes voyant leur étendard la mine défaite perdent de leur superbe. Puis une rumeur se lève et se propage, telle une Ola, jusqu’au camp où se bâfre l’état major de Démagogix.

Au son de la rumeur, sans même comprendre ce qui se passe, l’état major frissonne de peur. Un doute les secoue. La fureur du couard les saisit. En bons couards, ils tremblent frénétiquement. Leurs couronnes dentaires éclatent sous les claquements de dents. Leurs implants capillaires tombent sous le stress. Leurs pacemakers jouent de la boite à rythme. Ils jouent le grand air de la « tachycardie. » Agrippés à leurs maroquins, ils attendent que le sortilège cesse…