dimanche 13 juillet 2008

CHAPITRE 6 « WAR ZAO ATAO » (1/5)


« Alors Didactix, ça va mieux on dirait. Je vois que tu retrouves l’appétit » lui demande Constitutionnix en souriant. Tout le monde rigole de nouveau.

Didactix bougon, comme lorsqu’on redescend trop abruptement d’un bon kif, répond « au lieu de te moquer, dis-nous plutôt ce que sont ces histoires de fées des piscines, d’épée magique et de McAfyx. J’ai eu du mal à tout écouter »… « Tu m’étonnes ! » l’interrompt Syndicaline goguenarde.

« Ça va ! C’est bon ! Quoi que tout bien réfléchi, ça ne va pas. Je m’en veux de ne pas avoir pensé à lui demander son numéro de boule de cristal portable, histoire d’obtenir des renseignements complémentaires »… « La marque de son maillot de corps par exemple, non ? » Conclut Syndicaline encore une fois.

Didactix, aussi timide qu’il est grande gueule, commence à voir rouge. Il n’aime pas trop qu’on le titille quand il se trouve vulnérable devant la gente féerique.

Contitutionnix lui dit alors « Ne t’en fais pas. Quelque chose me dit que tu la reverras, sans doute bientôt »… « À nouveau trempée ! » interjecte encore une fois sa copine Syndicaline.

« Au lieu de faire la maligne, tu ferais mieux de te demander comment trouver ce fameux McAfyx tiens ». Syndicaline sifflote pour marquer sa gêne.

Constitutionnix y réfléchit de son côté. Mais il a beau fouiller dans sa mémoire, les propos de la fée ne lui rappellent rien. Toutefois il se dit que la solution ne doit pas être bien loin. Il regarde autour de lui en quête d’un indice, d’un signe que lui accorderait ce lieu où il sent la présence d’ondes magiques. Bonne initiative !

Alors que son regard scrute la rivière, un gros saumon saute trois fois hors de l’eau, à chaque fois un peu plus haut. Constitutionnix comprend instantanément le message. Il regarde vers la cime des arbres. Sur l’une des branches les plus hautes, se trouvent trois corbeaux qui le fixent du regard. Constitutionnix les fixe à son tour pendant trois bonnes minutes à l’issue desquelles il étend un croassement provenant de derrière lui. Il se retourne et voit une silhouette blanche traverser rapidement le ciel. Regardant de nouveau les trois corbeaux, il les voit s’envoler sans bruit, faire trois tours autour de lui, puis se diriger vers le soleil couchant en croassant à trois reprises, trois mots aux sonorités bretonnantes. « War Zao Atao ».

« War Zao Atao », enfin quelque chose qui semble interpeller sa mémoire. En attendant de se rappeler ce que c’est, une chose est déjà certaine. Les indices indiquent clairement que la solution se situe du côté de Gesocribate (Brest) et sa grande baie où la mer accueille le Soleil pour son sommeil. C’est là en effet que nichent les corbeaux savants.

Décision est donc prise de partir vers Gésocribate après un passage par le village, histoire de se restaurer et de se reposer un peu. La marche se fait plus rapide.

samedi 12 juillet 2008

CHAPITRE 6 « WAR ZAO ATAO » (2/5)


Tous nos amis ainsi que le reste du cortège arrivent aux abords du village au petit matin. La brume est épaisse. Constitutionnix a tout d’un coup le ventre qui se noue. Il ne comprend pas pourquoi mais une soudaine nausée monte en lui. Il est trop fatigué pour chercher à comprendre. Syndicaline et Didactix mettent tout cela sur le compte de la bataille et de la défaite qui se rappellent sans doute à lui.

Ils s’approchent ainsi du village, cherchant à traverser ce rideau de brume qui refuse de s’ouvrir. La lumière s’y met aussi. L’aube semble recouvrir le village d’un manteau de pudeur. Le Soleil est peu enclin à leur exposer le triste panorama qui s’offre à leurs yeux, maintenant qu’ils sont aux portes d’Intérêt Général.

Constitutionnix vient de rendre. Syndicaline et Didactix sont tout aussi livides. Les ruines des abords du village se jettent à leurs visages. Les pierres sont noires et encore fumantes. Une odeur de soufre les prend à la gorge et leur brûle les yeux. L’horreur est si dense qu’elle stagne à même le sol, refusant de se disperser dans les airs. Les faubourgs d’Intérêt Général ne sont plus que ruines et leurs cœurs, rancœur.

Ils parcourent les rues du village, désertes. Les rescapés, en entendant la colère de nos amis et de la foule qui les suit, sortent de leurs abris de fortune et leur racontent, pendant plusieurs heures, l’assaut mené par la cavalerie de Dark Spéculator. L’un des rescapés a pu arracher, en se défendant, l’une des torcravattes qui pendaient au cou des cavaliers. Il la tient rageusement dans l’un de ses poings. « Ce sont eux ! Ce sont eux qui ont fait ça ! » crie-t-il avant de tendre la torcravatte à Didactix qui l’examine. Au dos de la torcravatte on peut y lire un nom ainsi qu’une série de chiffres qui intriguent Didactix. Il se dit qu’il tirera cela au clair plus tard. Car il vient de se rappeler que son frère Caissieràminiprix n’avait pas pu participer à la bataille suite à une lombalgie provoquée par son travail, et était resté chez lui alité. Il marche de plus en plus vite dans les rues d’Intérêt Général. Ses amis ont du mal à le suivre.

L’immeuble où habite son frère est en ruines lui aussi. Il regarde autour de lui. Rien ! Il descend dans les caves. Toujours rien ! Il interroge les voisins. Aucune trace de son frère. Frénétiquement il cherche longuement tout indice en mesure de l’aider. Il tombe finalement sur la gardienne de l’immeuble, qui avait trouvé refuge dans un local à poubelles.

« Madame Poilauxcanines, avez-vous vu mon frère ? » demande Didactix.
Madame Poilauxcanines répond avec son accent de gardienne lusitanienne « Jou l’ai vou se faire attraper par lou’ch méchantes cavaleiros. Ils ont agité oun collier devant les yeu’ch de votre frayre en racountant des chowses bizarre’ch. Et puis votre frayre les a suivi’ch sans rien dire ». C’était la goutte qui faisait déborder l’amphore.

Syndicaline, Constitutionnix et Didactix entrent en fureur. Leurs veines ne charrient plus que colère, leur bile tourne vinaigre, leurs tempes se font tambours, leurs yeux coupes de sang. Leurs cordes vocales noués sonnent le tocsin. Leur ventre se fait bronze et l’ire y résonne de toute part, se répandant en secouant de vibrations toute l’assemblée dépitée qui se rassemble autour d’eux.

L’arme, l’épée magique. Il leur faut l’épée magique, et vite. Il leur faut être à Gésocribate, et très vite. Syndicalix qui se trouve à leurs côtés et qui bout tout autant, propose à nos trois amis de leur prêter son char magique en même temps que Cégétix se porte volontaire pour les accompagner dans la quête de l’épée. Il pense connaître son mystérieux nom et par conséquent le moyen de libérer son pouvoir. Didactix, Syndicaline et Constitutionnix acceptent bien volontiers cette aide.

Syndicalix sort alors une corne de brume dans laquelle il souffle avec force. Quelques instants après, un nuage de poussière se dirige sur eux. Il s’agit visiblement du char magique de Syndicalix. Le nuage de poussière s’arrête devant nos compères provoquant chez eux une quinte de toux. Puis le nuage se dissipe laissant apparaître le char. Syndicaline, Didactix et Constitutionnix s’attendent à voir de magnifiques chevaux tatoués de seize soupapes, mais ce n’est pas ce spectacle qui s’offre à eux. Leurs visages marquent une expression décontenancée.

Attelé à un magnifique char couleur noire métallisée, type pousse-pousse quatre places, on peut y voir une sorte de petit diablotin tout gris et tout malingre. Nos trois compères se tournent interrogateurs vers Syndicalix.

lundi 7 juillet 2008

CHAPITRE 6 « WAR ZAO ATAO » (3/5)


Syndicalix leur explique qu’il s’agit d’un ancien gros spéculateur qui expie par ce sort un passé d’exploiteur patenté. Cégétix regarde Syndicalix d’un air désapprobateur. Mauvais Karma ou pas, c’est là également de l’exploitation, chose qu’il condamne. Syndicalix rétorque qu’il n’a pas de leçons à recevoir de quelqu’un qui, si l’on en croit Nationalelectrix, a siphonné une partie du trésor de la fée Électricité par le biais d’un comité d’entreprise écran. La discussion s’envenime, mais Constitutionnix y met fin en rappelant que le temps n’est pas aux vaines disputes. C’est presque la fin de l’après-midi et il faut partir pour Gésocribate.

Cégétix, Contitutionnix et Didactix montent dans le char, suivis bientôt de Syndicaline à qui Syndicalix finit d’expliquer comment utiliser le char. Une fois installés et la destination indiquée au chauffeur, celui-ci démarre en trombe. Le petit diablotin tire le char si vélocement qu’il leur est presque impossible de distinguer la route et le paysage.

Le soir tombe lorsque le diablotin se met à rougir. Syndicaline peste et Didactix lui demande ce qui se passe. Syndicaline lui répond que le diablotin chauffe anormalement et qu’il faudra, selon les consignes données par Syndicalix, s’arrêter bientôt pour le laisser se reposer, mais surtout le faire boire dans un cours d’eau vive, sans quoi il risque de partir en fumée.

Ils ralentissent et se rendent compte qu’ils traversent actuellement un joli village armoricain. Ils ne sont plus très loin de Gésocribate. Sur la place de ce village, ils demandent à un vieil habitant, peu surpris par l’attelage, s’il n’y aurait pas une auberge dans le coin et surtout un cours d’eau vive où le diablotin pourrait se désaltérer. Le villageois leur indique dans une sorte de marmonnement la direction d’une auberge et celle du « gué des lavandières ».

Afin de faire au plus vite, ils se repartissent les taches. Cégétix et Constitutionnix se chargent de prendre des chambres à l’auberge tandis que nos deux amis emmènent le diablotin se désaltérer au « gué des lavandières ».

Didactix et Syndicaline s’approchent de la rivière. Le diablotin le sent et se met à courir comme un damné puis à boire goulûment. Il se redresse satisfait perdant sa rougeur. Mais subitement, il passe du gris habituel au violet, tremblotant de froid et s’écroulant en bavant. Syndicaline et Didactix s’approchent du diablotin et remarquent que sa langue est devenue toute verte. Didactix goûte l’eau. Elle est infecte, acide et avec un goût très prononcé de nitrates. Le diablotin tremble comme un démon en Antarctique. Que vont-ils pouvoir faire pour sauver le diablotin, se demandent nos deux compagnons. Constitutionnix saurait bien quoi faire lui, mais il n’est pas là et le diablotin est intransportable tant il est secoué de spasmes violents.

Syndicaline se propose de le garder pendant que Didactix ira chercher le druide. C’est ainsi qu’il se retrouve à courir dans une pénombre crépusculaire et forestière. Mais Didactix ne fait pas cinq cent mètres que soudain une branche d’arbre le gifle violement. Il s’écroule au sol. Se relevant tout surpris, il se tourne vers l’arbre interrogateur et en colère.

« Bons dieux ! » Se dit-il sans oser bouger le moindre petit doigt. Vert de peur, il ne sait que faire. Un gigantesque serpent au regard étincelant se tient devant lui. Il vient de sortir de derrière l’arbre et le fixe comme une proie, drapé dans deux longues ailes de chauve-souris qu’il déploie lentement comme pour chercher à le saisir. Passée la stupeur et se sentant fait comme un rat, il a un sursaut de conscience qui lui ordonne de déguerpir. Ses jambes recevant enfin l’instruction se mettent furieusement en mouvement. Le serpent le poursuit, se déplaçant comme sur des coussins d’air. Didactix se met alors en mode sanglier traqué, détalant de plus belle. Il se retrouve quelques secondes plus tard, de nouveau, au bord de la rivière, qu’il longe en sprintant lorsque subitement il se retrouve de nouveau par terre. Un autre arbre vient de le gifler. Il se relève non plus apeuré mais furieux.

« C’est quoi cette forêt ! » s’exclame-t-il, tout en sortant de l’une de ses poches un coupe-ongles avec lequel il compte bien, faute de mieux, se défendre du serpent géant. Aussi il se tourne vers l’arbre s’attendant à voir apparaître le saurien. Mais point de saurien. Par contre, sans doute, une vague cousine du serpent en question, se tient devant lui.

Une vieille femme hideuse au possible, vêtue de loques, le regarde avec des yeux verts dont l’éclat semble radioactif. La colère fait place à une première impression de dégoût puis, d’une façon inexplicable, à une curiosité bienveillante.

Que fait-elle là, cette pauvre femme, se demande-t-il. Mais c’est l’apparition qui lui pose cette même question avec une voix de craie rayant un tableau scolaire. Didactix se rappelant qu’il vient d’échapper à un serpent géant et qu’il est chargé de trouver le bon vieux druide, lui répond qu’il doit dénicher un remède contre les eaux de la rivière, qu’il s’excuse mais qu’il n’a pas le temps pour discuter. Il s’apprête à partir quand la vieille dame le saisit par la manche et lui dit qu’elle seule peut guérir son diablotin. Didactix reste coi. Comment est-elle au courant ? Elle le regarde avec insistance. C’est étrange mais il lui semble distinguer derrière ses rides, innombrables comme les creux d’une mer déchaînée, comme un sourire coquin et intéressé.

Didactix lui demande comment est-elle au courant pour le diablotin. Elle ne lui répond pas mais lui dit autre chose qui fait réapparaître sur le visage de Didactix, une expression de dégoût. S’il veut retrouver son diablotin vivant, il lui faudra l’embrasser. Le dégoût disparaît peu à peu. Effectivement, il faut sauver le diablotin. Il leur faut trouver McAfyx et l’épée magique. Il lui faut sauver son frère Caissieràminiprix. Et puis s’il n’y a que ça pour rendre heureuse cette fille de la déesse Solitude, Intêret Général vaut bien un baiser visqueux. Après tout la tendresse est également une richesse qu’il convient de redistribuer.

dimanche 6 juillet 2008

CHAPITRE 6 « WAR ZAO ATAO » (4/5)


Chose étrange, au fur et à mesure qu’il approche sa bouche des lèvres de la sorcière, il lui semble reconnaître quelque chose de familier dans ces yeux verts, entourés de rides. Finalement il dépose un baisé sur ces lèvres fripées en tachant de garder les yeux bien ouverts, histoire de ne pas lui manquer de respect. Et bizarrement, le contact avec cette bouche qui semble au premier abord sèche et fanée se fait progressivement agréable. Les pétales de ce visage se font douces et charnues. Les rides disparaissent et les yeux se parent d’un très joli vert. Surpris, il recule la tête, un peu décontenancé par toutes ces diableries. Un nouveau visage s’offre à ses yeux à la limite du bris de cornées. Les pommettes de Didactix rougissent tellement que la vision infrarouge de la faune alentour s’en trouve éblouie. Loanamélusine qui se tient devant lui.

« Bonsoir Didactix» dit-elle en souriant ; « alors comme ça, on aime les vieilles dames ? » poursuit elle en éclatant de rire. « À vrai dire, seulement les fées mûres aux yeux verts » répond Didactix en forme de pirouette, afin de masquer sa surprise.

« Moi je vois surtout ta grandeur d’âme Didactix. Prêt à tout pour Intérêt Général n’est-ce pas ? » lui dit-elle doucement. « Dis-moi jolie fée des piscines. Tu ne me draguerais pas par hasard ? » lui demande-t-il en retour.

« On peut dire ça comme ça mon beau coup de foudre. D’ailleurs étant donné que nous autres fées ne faisons rien à moitié, et puisque je nous sais faits l’un pour l’autre, je me permets de te demander en mariage » souligna-t-elle en riant. « À une condition toutefois. Il te faudra choisir. Tu ne pourras m’avoir que hideuse le jour et belle la nuit ou l’inverse, selon ton désir. »

Didactix, ému, fou d’amour, fou de joie, ne sait que dire. Pour lui, elle était tout simplement merveilleuse et lui tout simplement heureux chaque seconde qu’il passe à ses côtés. Il commence par lui répondre avec de l’humour, « en somme, pour le meilleur et pour le pire ou vice-versa, c’est ça ? » avant de conclure avec un « à toi de choisir, jolie fée, ce qui serait le meilleur pour nous deux. Je m’en remets à ta sagesse. »

« T’es un vrai démocrate ! » Dit-elle en riant. « Puisque tu es ainsi, tu auras mon meilleur tout le temps mais avant cela tu devras finir ta mission. »

Sa mission ! Elle lui revient subitement à l’esprit. Le diablotin, son frère, le village, l’épée. Loanamélusine et Didactix se mettent en route vers le « gué des lavandières ». Syndicaline qui s’occupe toujours du diablotin voit arriver le couple. Reconnaissant la fée, elle sourit. «Je comprends maintenant pourquoi tu tardais à revenir » lança-t-elle en direction de son vieux pote. « Ce n’est pas le moment pour les vannes et puis écarte-toi du diablotin, Loanamélusine va le soigner» répondit Didactix.

La fée mignonne sort alors d’entre ses jolis petits seins, une fiole contenant une liqueur sacrée. Il s’agit d’un cidre fabriqué à partir des pommes du jardin de Jolie d’Avalon. Elle en dépose une goutte sur les lèvres du diablotin qui retrouve instantanément sa couleur caractéristique. Didactix ne peut détacher ses yeux de sa jolie fée des piscines. Syndicaline le remarqua et sourit. Le diablotin est guéri. Alors Syndicaline relève le petit-gris et dit à Didactix qu’il n’a qu’à la retrouver, ainsi que les autres, plus tard à l’auberge. Et oui, le temps presse mais le désir aussi.

Loanamélusine conduit son Didactix vers sa demeure. Il s’agit à première vue d’un gros rocher dans la forêt. Le regard de Didactix se fait dubitatif. Nulle entrée n’est visible. Brusquement, la fée jolie prend fermement la main de son compagnon et se jette avec lui contre la paroi rocheuse. Il ne résiste pas et découvre qu’un passage magique s’est ouvert. Ils sont maintenant à l’intérieur du rocher. Un intérieur sobre mais aménagé avec goût.

« Tu sembles surpris » lui demande Loanamélusine. En souriant, Didactix répond que oui, « agréablement surpris, en effet. À vrai dire, je m’attendais à quelque chose de plus rococo, avec du mobilier en or massif, conformément aux vieilles légendes féeriques ».

« Il fut un temps, c’était le cas, surtout chez les générations précédentes de fées mais deux événements ont pas mal changé nos habitudes. Tout d’abord, cet infâme Vivendix qui a trouvé le moyen de piller presque tout l’or des fées des rivières. Et puis l’arrivée dans nos contrées de la fée Engshui qui nous a appris à aménager nos intérieurs différemment. Suis-moi, je vais te faire visiter… »

La suite ! Et bien, elle ne vous regarde pas. On suppose qu’ils s’échangeront des mots doux, des mots fous, qu’ils s’embrasseront et s’étreindront passionnément.

À l’auberge, Syndicaline raconte ce qui s’est passé. Constitutionnix sourit. Cégétix n’écoute pas ; il ne pense qu’à l’épée. Puis tout le monde finit par s’endormir aussi bien à l’auberge que dans le rocher.

mercredi 2 juillet 2008

CHAPITRE 6 « WAR ZAO ATAO » (5/5)


Les premiers rayons du soleil tirent au même moment de leur sommeil, aussi bien Constitutionnix que Loanamélusine. Cette dernière réveille tendrement Didactix. Heureux homme ! Car les fées savent éveiller un homme comme peu de femmes savent ou acceptent de le faire. La fée Latia étant la plus experte en la matière.

Il est temps de poursuivre la route. Loanamélusine explique à Didactix qu’il leur faudra longer la côte Nord vers l’Est. À vingt-cinq lieues d’ici, se situe la ville des fiers Lexobiens (Lannion). Une ville où se trouve l’un des plus majestueux sanctuaires dédiés au dieu Lugh, le dieu des arts et techniques. Dans cette cité où la devise « war zao atao » signifie « en avant toujours », ils trouveront McAfyx. Il sera sans doute à l’une des portes de la Lughopole « Anticipa », fanfaronnant tout prés du sanctuaire. Puis ses propos se font plus sibyllins. Elle lui dit que pour trouver McAfyx, ils devront recréer les réseaux, se souvenir en réseau, car nulle quête solitaire, même la plus déterminée, ne peut l’être totalement. Elle lui dit aussi qu’il leur faudra entrer dans le labyrinthe et débusquer l’Unité Centrale avec son écran qui ouvre les portes de l’inframonde. À cet effet, elle lui tend un cédérom magique. Didactix renonce à éclaircir toutes les phrases de sa fée jolie. Loanamélusine finit en annonçant à son amoureux que Constitutionnix aura en route une belle surprise.

Après toutes ces explications, vient le temps des embrassades, impatientes de nouvelles étreintes. Loanamélusine et Didactix se quittent le regard brumeux et s’échangent un « à bientôt » désireux. Didactix tourne le dos et Loanamélusine soupire. Il était temps qu’il parte car elle n’aurait pas pu dissimuler son inquiétude plus longtemps. « Ton chemin est long mon amour et les routes de l’inframonde bien périlleuses. Que les dieux te gardent en mon monde ! Que Belenos éclaire ta route ! Que Lugh te guide dans les dédales ! Et que Oengus me ramène mon amour !» Telle était la prière de cette fée aimante.

La petite troupe accueille Didactix avec de grands sourires. Didactix le leur rend accompagné d’un « ben quoi ? » « Rien ! Rien ! » Disent-ils tous en cœur. Didactix donne les informations qu’il détient et le diablotin peut se mettre à tirer son pousse-pousse quatre places. Ils longent la côte depuis maintenant une bonne heure. « Léxobie ? Léxobie ? ça me rappelle quelque chose, » se dit Constitutionnix avant de s’assoupir sous le roulis du pousse-pousse décapotable.

« Aïe ! » s’écrie Constitutionnix soudainement. Une vive douleur sur le sommet du crâne vient de le sortir de sa torpeur. Ses compagnons se tournent vers lui mais ils le regardent au-dessus de sa tête, étonnés. Constitutionnix finit par sentir une présence sur son crâne. Il fait un geste pour saisir ce qui le gêne mais d’un bond, la chose lui saute sur les genoux. « Ben ça alors ! » Dit-il. Ce qui vient de le réveiller d’un coup de bec sur la tête, est en fait un beau corbeau tout blanc, un légendaire corbeau albinos aux yeux rouges, brillants comme deux rubis volés à un maharadjah. Tous se trouvent hypnotisés par le corbeau. Tous sauf le diablotin bien évidemment qui continue imperturbable à tirer son pousse-pousse.

Tout d’un coup, l’effet hypnotique est brisé par les éclats de rire heureux et émus de Constitutionnix. « Maître, mon bon vieux maître ! » S’écrie-t-il. Il venait de reconnaître Gutuaterix, le grand druide, son vieux maître qui visiblement avait choisi de se réincarner dans ce magnifique corbeau blanc. Le corbeau se met à rire tout autant, joyeux que son élève le reconnaisse.

C’est alors que Cégétix, Syndicaline et Didactix assistent à une conversation hallucinante entre leur vieux druide et ce corbeau tout blanc. Quoiqu’en y réfléchissant bien, tout cela les étonnait de moins en moins. « C’était toi, alors, la silhouette blanche que je surprenais parfois ? » « Oui ! » Répond le corbeau. « Tu as assisté à toutes nos péripéties alors ? » « Oui ! » Refait le corbeau. « Visiblement, t’en a connu quelques-unes unes toi aussi » , dit Constitutionnix en remarquant quelques cicatrices sur le nouveau corps de son vieux maître.

Gutuaterix explique qu’il s’était battu férocement, au printemps, contre des nuées de corneilles, voraces comme jamais auparavant, au moment où elles s’envolaient depuis leur base installée dans la forêt de Meudon, afin de saccager, en guise d’apéritif, des nids de moineaux et d’hirondelles. Repues, elles prospéraient. Cela l’avait inquiété. Elles se multipliaient telles des sauterelles, ce qui lui avait rappelé d’anciennes prophéties.

« La corneille piaille les veilles de bataille. Elle attend le festin qu’elle fera des carcasses laissées sur le champ des conflits sociaux ».

En écoutant cela Syndicaline et Didactix se rappellent les propos énigmatiques tenus par le vieux pigeon de la Sorbonne. Il parlait lui aussi des corneilles de la forêt de Meudon. Tout le monde tourne son visage vers le couchant en ayant une pensée pour les victimes de la dernière bataille. L’atmosphère se fait pesante dans le char, et ce malgré la joie que ressent Constitutionnix d’avoir retrouvé son vénéré mentor.

Nos amis se dérident progressivement. Ils pensent à la nécessaire contre-attaque et à la fameuse épée magique dont ils devront trouver le nom. Le mot épée magique prononcé par Didactix déclenche une réaction chez Cégétix. Comme s’il se trouvait au milieu d’un cauchemar, Cégétix se met à hurler dans le char, secoué de rires nerveux, «Gwrève Gwénwéralh ! Gwrève Gwénwéralh ! »