jeudi 25 décembre 2008

INTRODUCTION


Promise en septembre 2007 à mes lecteurs du REPUBLICOIN, la voici, la grande aventure syndicale. Une aventure écrite comme un refuge lors des grèves de 2003 et en réponse à l’humour poujadiste, anti-syndical qui circulait alors sous le nom « les aventures de Cégétix ».

Ma vision des choses ayant évolué avec le temps et au contact de pas mal de réalités, vous trouverez ici, lorsqu'il sera terminé, le premier roman qui se lit de gauche à droite dans tous les sens du terme :-)

Pour faciliter la lecture, les posts seront inversés chronologiquement, de décembre à janvier… Allez, trêve de bavardages, on y va. Prologue…

mercredi 24 décembre 2008

SYNDICALINE VERSUS DARK SPECULATOR : PROLOGUE


En l’an de grâce 2012 après J.C. ou selon le nouveau calendrier « réformé », l’an 17 après « La Grande Dérégulation », toute la France sera enfin Reformée. Ils auront réussi à la réformée P4 ! ! !

Toute la France ? Non ! ! !

En effet, une poignée d’irréductibles attachés à la République Une, Indivisible, Laïque et Sociale résistera encore et toujours aux envahisseurs dirigés par Dark Speculator qui règne sur l’Empire de COM depuis ses îles du Grand Caïman.

Mais remontons un peu dans le temps.

En cet an 8 (2003), nos héros retranchés dans le village « Intérêt Général » résistent à l’encerclement mené par les traîtres vendus à l’occupant et qui sont cantonnés dans les camps fortifiés de « Fondepensium », « Profitsmaximum », « Speculatium », « Consortium » et « boitedecom ».

Toutefois avant de présenter nos héros, décrivons les lieutenants du sombre seigneur, les traîtres qui ont rejoint les fortins de l’occupant et les esclaves enrôlés de force dans son armée.

Démagogix : Grand chef des armées pour la zone France: époux de Sacvuitonàlamimine, il a cherché désespérément, pendant plus de 20 ans, à devenir Grand Général, en promettant toutes les victoires, toutes les merveilles, en organisant de grands banquets sur le compte du connétable et surtout du contribuable. Démagogix n’a qu’une seule crainte : Que les factures lui tombent sur la tête!

Girondix : C’est le nouveau lieutenant de Démagogix. Appelé également Monseigneur de la Bosse puisqu’un sort jeté par Démagogix, lui fait gonfler sa bosse cervicale un peu plus à chaque mission échouée. Girondix est chargé d’offrir Belle France, sur un plateau doré, à Dark Spéculator. Dans ce dessein, il utilise la décentralisation pour pouvoir vendre Belle France, en morceaux, à tous les intérêts égoïstes. Il est aidé dans son projet par le Baron Ernestum Wendelium.

Petitfascix : Il est l’un des multiples fils illégitimes de Dark Spéculator. C’est un prédateur redoutable. Son rêve, dévorer Belle France. Pour y parvenir, il raconte à ceux qui ont vraiment faim qu’il partagera la France gironde avec ceux qui seront de bons gaulois et qui se battront pour lui, Le Chef. Bien sûr il espère qu’ils mouront tous dans la bataille afin de pouvoir tout manger avec ses amis.

Vivendix : Fils prodigue de Belle France, il s’est laissé séduire par Dark Spéculator et le chant des sirènes du grand océan. Du coup, il a renié sa mère et ses tantes, les gentilles fées des rivières. Il emportera tout l’or déposé dans le lit des rivières par le bon peuple, afin de pouvoir courir ce qui s’averra être une aventure désastreuse.

Cadremoyenaigrix : Il est centurion dans l’armée de Dark Spéculator. Sa solde de mercenaire s’élève à 2 fois le SMIC pour 2 fois 35 heures de service militant. Son objectif consiste à gagner 3 fois le SMIC pour pouvoir faire partie des maîtres du monde et participer aux majestueux banquets donnés sur l’île paradisiaque du Grand Caïman.

Vendesassurancestoutrix : Meilleur ami de Cadremoyenaigrix, il s’agit d’une créature insatiable de la race inculte des commerciaux. La race à l’origine de l’Empire de Com. Il a été adoubé par Girondix, Chevalier de l’Ordre du Grand Caïman, en armure plaquée or de marque Rolix. Il combat pour son maître qui lui promet le Monde s’il atteint ses « zobjes », ses objectifs de vente.

Caissieràminiprix : Hypnotisé puis transformé en zombie par les mages de Démagogix, qui lui ont fait croire qu’il n’y avait plus de rapports de force dans le monde du travail, que les syndicats ça rend stérile, ça mange les enfants, et qu’il n’est pas un employer mais un co-équipier. Du coup, enchaîné à la rentabilité de sa caisse enregistreuse, il méprise les ouvriers, les employers, les syndicats, fier qu’il est de sa récompense de co-équipier.

Poujadix : Râleur invétéré et exigeant, il veut des hôpitaux, des écoles, des routes de grande qualité. Mais il ne veut pas payer d’impôts et ne veut pas de fonctionnaires. Il préfère donner son argent aux officiers de Dark Spéculator qui lui vendent des services toujours plus chers et de toujours moins bonne qualité.

NOS HEROS

Syndicaline: Syndicaline est tombée dans le chaudron de Dagda quand elle était toute petite. Le chaudron solidaire qui redistribue à ceux qui en ont besoin. Fille d’ouvrier métallurgiste, ingénieur en aéronautique après avoir fait un CAP, Bac-Pro, DIUT, elle étudie désormais le droit social après ses journées de travail. Ce qui lui permet de défendre les droits des salariés au sein de son syndicat.

Didactix: Ami d’enfance de Syndicaline. Humaniste ultra-qualifié, sous-payé sur une base de 10 mois annualisés, supportant l’humeur des parents, des élèves et de la bureaucratie, Didactix se bat malgré tout pour maintenir un savoir digne d’une démocratique. Un savoir qui éclaire et qui libère. Vous remarquerez qu’il ne manifeste jamais pour son salaire mais toujours pour ses élèves ou bien l’Intérêt Général.

Démocratix le chef : C’est un dirigeant politique travailleur mais un peu naïf. Il est de ceux qui travaillent pour le bien de Belle France sans la ramener. Comme il a oublié d’expliquer sa politique et de rappeler aux Français tout ce qu’il a fait pour eux, ceux-ci sont tombés dans les mensonges et les sorts d’oubli que Dark Spéculator a enseigné à Démagogix.

Constitutionnix le druide : L’un des 9 plus grands sages de Belle France. Il est l’un des gardiens sacrés des Saintes Tables de la Nation. Il est toujours prêt à aider nos amis dans la défense d’Intérêt Général, notre beau village.

Staracademix : Barde maudit, il a fait de la prison médiatique par amour de l’art. Il attend l’inspiration et le talent qui tardent à venir mais c’est un fidèle compagnon, adorateur de la déesse Solidarité.

mardi 23 décembre 2008

SYNDICALINE VS DARK SPECULATOR : CHAPITRE 1 LE RAPT (1/4)



An 7, ce fut l’année où les oiseaux de mauvais augure firent leur nid tout en couvant la grippe. En effet, les osselets divinatoires rougissaient de sang, devenant caillots sur la table des prophéties. L’oracle tremblotait de froid. Toujours cette maudite grippe. Un voile sombre tombait sur les femmes jusqu’à la racine des cheveux. La constellation d’Orion se levait, la massue menaçante sur les enfants d’Adonaï, dont des maisons brûlaient. Des nuées rouges, brunes et vertes, cousues en chemises, s’étendaient au firmament, attendant d’être vêtues par les mauvais esprits. La tempête se levait et l’enfant moqueur du monstre marin pataugeait. Le Total-Elfiathan, l’enfant méprisant du Léviathan crachait, en horrible pieuvre géante qu’il est, son encre visqueuse et vénéneuse. Tant de présages hurlaient aux oreilles des hommes et personne pour les entendre. Les Pouvoirs, du premier au quatrième étaient sourds du fait de leurs petites morts honteuses. De toute évidence, il y avait quelque chose de pourri au Royaume des Grandes Marques.

L’an 7 (2002). En vérité, je vous le dis, cette année-là fut une bien triste année. Mais le cycle désastreux ne se manifesta vraiment qu’entre la fin du mois de la Noël, parrainé par Saint Toyzarius, et le début du mois des Etrennes, sous le patronage de Saint Dartius, selon le nouveau calendrier « réformé ».

En ces veilles de Noël, Constitutionnix le Druide venait de passé une très mauvaise nuit. Des cauchemars ponctués de frisons et autres sueurs l’avaient un peu secoué. Pendant ses périodes d’éveil, il crut entendre la voix lugubre de BadBercix le Grix, le Mage des mesures, lancer à travers le brouillard, diverses incantations redoutables : « S = a(1+r)N », « facilités d’ajustement structurel », « endettement net de la Nation », « I.S.F caducus ». Des incantations à manier avec sagesse. Des incantations catastrophiques entre de mauvaises dents.

L’aurore venue, tout en redressant sa pauvre tête, plombée par la nuit passée, Constitutionnix remarque en regardant par sa fenêtre, qu’en ce matin d’après solstice d’Hiver, l’ombre refuse de reculer. L’aurore est timide. L’ombre triomphe encore. La Frange du firmament étant même d’un rouge martelé. Contitutionnix comprend alors que le retour du jour est marqué par le sceau brûlant des filles des forges, divinités souterraines assoupies depuis bien longtemps.

« Pourquoi se réveillent-elles celles-là » se demande Constitutionnix. « Est-ce la hausse des cours de l’acier qui rend leur savoir faire de nouveau rentable en ces contrées ». Alors qu’il se pose ces questions, adossé à sa fenêtre, il lui semble entendre de nouveau la voix de BadBercix. Celle-ci psalmodie lourdement, dans un rythme déjà ancien « si j’avais trois marteaux, je taperais le jour, je taperais la nuit, je taperais toujours, sur le prolétariat… ». Voix qui ne semble perçue que par lui, le reste du village étant plongé dans une étrange léthargie. Personne n’est dehors alors que d’ordinaire une grande partie des habitants d’Intérêt-Général se lève tôt pour aller travailler.

Inquiet par tous ces signes, Constitutionnix quitte le village sans mot dire de peur d’inquiéter ses amis pour rien et désireux de tirer tous ces signes au clair. Par des chemins magiques réservés à son seul ordre, il se dirige à toute vitesse vers la forêt sacrée des druides, située au coeur de la Nation. La forêt de « Conseilconstitutionnix » où, après avoir contacté ses pairs par téléphone portable, puisqu’il faut bien vivre avec son temps, doit se tenir une réunion extraordinaire.

Les portes de la forêt sacrée sont devant lui, mais un étrange silence l’assaille alors que d’ordinaire résonne de tout cotés l’expression de la vie. « Vraiment bizarre tout ça » se dit-il. Se disant ça, trois croassements dont il n’arrive pas à déterminer l’origine viennent déchirer le silence. Il ne réussit à distinguer qu'une brève apparition blanche dans le ciel qui disparaît rapidement dans la cime des arbres. « Décidément étrange tout ça! » se dit-il, tout en s’enfonçant dans un chêne qui sert de porte à la chambre magique du Conseil.

« En quoi ces trois croassement sont-ils étranges » me demanderez-vous. Ah, les enfants de la Ville et leur crasse ignorance des choses de la Nature. Tout simplement parce que le corbeau a cette particularité de ne produire de croassements que par nombre pair. S’il en produit trois, chiffre magique dans la tradition druidique qui plus est, c’est que quelque chose de bizarre se déroule. Je vous jure, faut vraiment tout vous dire.

Après les salutations d’usage et autres bavardages protocolaires, Contitutionnix constate, à sa grande surprise, que non seulement les autres sages n’ont rien perçu de particulier dans le brouillard des dieux de ce matin mais qu’ils ne comprennent pas l’état dans lequel tout cela met Constitutionnix. Constitutionnix reste perplexe. « Étrange, vraiment étrange tout ça » dit-il pour se donner une contenance devant ses confrères. Il ne le croit pas si bien dire.

Alors qu’il commence à se demander s’il n’est pas devenu allergique à l’hydromel, qu’il a sans doute consommé plus que de raison pour fêter le solstice d’hiver, BadBercix déboule à travers l’un des chênes sacrés, qui explose avec son passage. En explosant, le chêne crée une brêche suffisamment importante dans le cercle de chênes magiques, entourant le Pommier de sagesse du Conseil sacré, pour que l’escorte à cheval de BadBercix puisse passer. Les Nazekools. La garde rapprochée de BadBercix constituée de sombres chevaliers. Les Nazekools. Un pipeau commercial puisque s’il s’agit bien de nazes, ils ne sont pas cools du tout.

Sans attendre la moindre réaction de nos bons druides, BadBercix lance une incantation à fragmentation. Avant qu’elle ne se fragmente et ne cible tous nos sages, Constitutionnix qui avait pris la mesure du danger dés qu’il aperçut BadBercix, cherche à protéger l’ensemble du Conseil.

Pointant son sceau sacré vers BadBercix, il lance : « Je suis un fils de l’ordre sacré des Gardiens des Saintes tables de la Nation ». Puis dessinant un cercle sur le sol avec la vive lumière de son sceau, il conclu par un « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale ; BadBercix, No Passaras! ».

« Pourquoi un No Passaras » me demanderez-vous. Décidemment ! Et bien parce que un « tu ne passeras pas » ça sonnait non seulement très nul mais ça faisait surtout très ligne bleu des Vosges, très ligne Maginot que l’ennemi contourne systématiquement depuis trois guerres (1871, 1914, 1940) en passant par Sedan. Alors « You shall not pass » ça claquait mais c’était déjà pris par un certain Gandalf face au Balrog dans les mines de la Moria du « Seigneur des Anneaux ». déjà pris comme le « No passaran ». Que voulez-vous Constitutionnix a le sens du Copyright. « Et tous ces -ix à la Asterix d’Uderzo alors ! » Rien à voir ! Ça m’étonnerait que Uderzo et Goscinny puissent prétendre detenir un droit quelconque sur Vercingétorix, le siège d’Alesia et tous « nos ancêtres les Gaulois », hommes et femmes telles que Blandine, blondine, Francine, Pascaline, Roseline… Mais revenons à notre « No Passaras » qui outre l’avantage de n’avoir jamais été utilisé, offre celui d’une crédibilité que seules disposent, à l’impératif, toutes ces langues naturellement d’Empire que sont l’Allemand ou le Castillan. Voici pour l’explication et revenons à notre récit. Donc « Badbercix, No Passaras ! »

La Terre prise à témoin par Constitutionnix l’assiste. La clairière sacrée à l’expression de douce frime rougit puis se met à briller de colère. Le sol vire vermillon et toute la forêt dénudée par l’hiver s’en mêle. La poussière s’élève ; la tourbe tournoie. La poussière se fait grêle dans un tourbillon de « saine colère » qui s’abat alors sur BadBercix. Une grêle qui s’abat sur lui avec une telle intensité qu’on croirait que la vertu de la Terre se défendrait elle-même. Les racines et les branches des chênes sacrés giflent BadBercix. Un BadBercix qui étrangement sourit...

lundi 22 décembre 2008

CHAPITRE 1 LE RAPT (2/4)



Ce qu’ignorent la forêt en colère et Constitutionnix, c’est que BadBercix revient tout juste de sa retraite méditative de mi-semaine, dirigée télépathiquement par son maître Dark Spéculator. Retraite au cours de laquelle son maître lui a enseigné de tout nouveaux sorts. Il brise donc la parade de Constitutionnix par un suraiguë « Décentralisation ! Synarchie !»

Constitutionnix, surpris, les tympans en sang, laisse choir son sceau magique, brisé en mille morceaux, puis sans avoir le temps de reprendre ses esprit, encaisse, avec les autres sages, une série d’attaques jusqu’au coup fatal. BadBercix prenant le temps d’engager ses cibles venait de lancer une salve de sorts inédits à tête chercheuse : « Via recta est, mais la pente est raide ! » ; « Bonne gouvernance ! » ; « L’avenir est une suite de quotidiens ! »… « Etat de Droite ! ».

Tous les grands sages tombent les uns après les autres dans un profond sommeil. Une fois cela fait, BadBercix lance un signal indiquant que c’est au tour des hélicoraptors d’entrer en action. Il s’agit d’une espèce de dragons, mi-bêtes, mi-machines, créée de toute pièces dans les laboratoires secrets du complexe militaro-industriel de Dark Spéculator. Des hélicoraptors qui s’étaient illustrés quelques années auparavant par la capture d’un procureur sur les contreforts de l’Himalaya. Procureur qui fut prié de lancer des sorts de classement sur un dossier qui engluait un ami de Démagogix.

Cette fois-ci, montés par d’autres Nazekools, ces hélicoraptors se chargent de transporter nos sages vers les geôles de leur lieu de captivité. Les geôles d’une prison horriblement connue sous un nom que seuls les initiés peuvent prononcer. Craignez son nom mes amis ou, si votre esprit est trop fragile, ne lisez pas ce qui suit. Elle se nomme, « les oubliettes de Communicatium ».

Mais ce n’était pas là assez. D’autres hélicoraptors se mettent à hisser le Pommier de sagesse après que les Nazekools au sol ont pris le soin de déraciner l’arbre sacré qui hurle à la mort telle la Mandragore. Un cadeau pour Démagogix qui souhaite se repaître à l’envie de ses fruits. « Notre maître sera grandement satisfait » se félicite BadBercix.

Le temps passa. On reconnu l’hiver aux mois Du Bilan Comptable sous le patronage de Saint Pacioli et celui du Carnaval. Puis arriva le mois des Pâques.

Après tout ce temps sans nouvelles, les amis de Constitutionnix s’inquiétèrent au-delà du supportable, moi y compris. « Qu’est-ce que je fous-là ? » me demanderez-vous ? À vrai dire, je ne saurais vous le cacher plus longtemps. Outre l’excellent narrateur de cette épique aventure, je fais également partie de cette bande de héros. Mais pour tout vous dire nous avons rencontré un problème. Un problème difficile à résoudre. Chacun d’entre nous, dans le cadre d’une démarche participative, tenait à raconter l’aventure à sa façon, à tour de rôle, un peu comme dans le nouveau testament. Face aux risques qu’encouraient la crédibilité et la cohérence de ce magnifique récit, l’un de nos conciliants amis, doué pour la synthèse, nous fit accepter l’idée que l’un d’entre nous serait l’unique narrateur à condition qu’il se fasse discret dans le récit. Aussi je me ferai discret. Promis juré !

Aussi donc, l’attente se faisant insupportable, Syndicaline et Didactix, nos héros, se mettent à demander partout si quelqu’un a des nouvelles de Constitutionnix. Or personne n’en a, pas même Démocratix le chef. Staracademix a bien une idée, mais elle s’avérera stupide comme d’habitude. Didactix poursuit les recherches sur Internet. Ce faisant, il tombe sur l’intéressant site « arrêt des mirages », créé par Médiatix et ses amis, écartés du panel officiel pour un professionnalisme désormais déviant. Site qui parle de la mystérieuse disparition des Grands-Druides du Pays, sans toutefois donner plus de détails si ce n’est une vague mention sur « les oubliettes de Communicatium ». L’inquiétude ne fait qu’augmenter.

Didactix se met alors à consulter méticuleusement toute la presse en quête de la moindre brève qui les mettrait sur une piste. Toujours rien. Jusqu’à ce qu’un banal article, sur la menace de grippe aviaire qui pèserait sur les pigeons urbains, fasse que Didactix se souvienne enfin de celui qui sait tout. Le Vieux Pigeon de la Sorbonne, l’un des neuf plus vieux animaux de Belle France, qu’il avait connu lors de ses études. Un Vieux Pigeon qui avait élu domicile dans la cour de la Sorbonne. Lui qui avait lu tous les livres de La Sorbonne avait pour habitude d’aider les étudiants à réviser, contre des boulettes de falafel, qu’il adorait tant.

Après en avoir parlé avec Syndicaline, nos deux compères décident de partir pour Lutetia, non pas sur le champ mais plutôt vendredi soir. Dans deux jours. « Pourquoi pas sur le champ » me le demanderez-vous ? Vous êtes marrants quand même. Il se trouve tout simplement que nos héros travaillent comme tout le monde pendant la semaine et ne peuvent pas se permettre d’abandonner ainsi leur poste pour courir l’aventure et ce même s’il s’agit d’une opération de sauvetage. Je vous pardonne va ! Il est vrai que bien des récits d’aventures nous ont habitué à ce genre d’incohérences.

Le Vieux Pigeon de la Sorbonne est toujours bien là. Toutefois, ils ne le reconnaissent pas immédiatement. Aucun pigeon ne sort vraiment du lot. Tous ces petits ovipares sont loqueteux, sentent fortement le gasoil et ont l’œil malade. Didactix finit par en remarquer un, au milieu de la cour qui traîne sa misère entre les étudiants avec ce qui semble être un vieux morceau de falafel dans le bec. On croirait qu’il attend le coup de pied ou l’écrasement libérateur.

Didactix qui a sur lui des boulettes de falafel toutes fraîches, en fait rouler une vers ce vieux pigeon. Alors que les autres pigeons restent indifférents à ce geste, ce vieux-ci a soudain les yeux qui se mettent à briller. Tournant la tête vers Didactix, il le reconnaît de suite. Fou de joie, il secoue ses plumes et se rend magnifiquement présentable. Nos deux amis assistent à la transfiguration du vieux pigeon. Après la transfiguration et les présentations d’usage vient le temps des questions. Didactix demande tout d’abord à quoi est due cette tristesse qu’il remarqua tout à l’heure dans son regard.

Le Vieux Pigeon, un peu gêné, dodelinant la tête d’en arrière vers l’avant, lui explique que plus aucun étudiant ne veut s’instruire avec lui. Son savoir n’intéresse plus personne. « Regarde cette cour, mon fidèle Didactix, regarde et vois comment la pensée se déprécie, comment les sciences Biactol polluent tout. Cette cour de Savoir ne tardera pas à devenir un Skate-Park. Or je refuse de voir ça. Pas chez moi ! »

Didactix comprend parfaitement ce que veut dire son vieux maître. Après cela, il lui explique le pourquoi de sa venue. Le Vieux Pigeon plonge son bec dans ses plumes du cou pour marquer sa perplexité.

« Je comprends mieux pourquoi j’ai fait récemment ce rêve étrange. Des corneilles se levaient en grand nombre depuis la forêt de Meudonum. Ces bêtes qui naissent pour les charniers, se multipliaient et dévastaient les nids des moineaux et des mésanges. Un mauvais présage.»

« S’agissant de votre Druide, je suis ici depuis que le premier écrit est entré dans ce bâtiment et j’ai beau les avoir tous lus, je n’ai jamais lu quoi que ce soit sur les oubliettes de la Communicatium. Toutefois je connais un animal qui est arrivé à Lutetia avant moi et qui pourra peut-être vous aider. »

Le Vieux Pigeon de la Sorbonne les conduit chez Le Vieux Caniche du riche bourg de Passy. Vieux Caniche de Passy qu’ils reconnaissent par contre, tout de suite, dés son arrivée dans le hall d'entrée du bel immeuble haussmannien où il demeure. Fier, après avoir uriné nonchalamment contre la porte de la gardienne de l’immeuble, un magnifique Caniche Royal se dirige vers Le Vieux Pigeon.

Après les présentations et autres bavardages protocolaires, maître Pigeon flatte le Vieux Caniche d’un « ça m’a l’air d’aller plutôt bien pour toi, vieux compère ». « Plutôt en effet. Que veux-tu, les affaires se portent bien. Que dis-tu d’ailleurs de mon nouveau gilet Burberius ». « Assez seyant, en effet», lui répond notre Vieux Pigeon avant de lui demander s’il n’a pas entendu parler du rapt des Grands-Druides et des « oubliettes de la Communicatium ».

« Je suis ici depuis l’arrivée du premier bourgeois et j’ai beau avoir assisté à tous les brunches, causeries et commérages, je n’ai jamais entendu parler des oubliettes de la Communicatium. Toutefois, je connais quelqu’un qui était là bien avant moi. N’ayant pas de course importante à faire, je veux bien vous y conduire. Ce n’est pas très loin d’ici. »

C’est ainsi que le Vieux Caniche les conduit chez La Puce dorée. Une Puce Dorée qui habite une superbe maison de ville dans le très riche bourg de Neuillius.

« Tiens c’est marrant, la sonnette ressemble à un bouton de démarrage », se dit Syndicaline.

En effet, dès que Le Vieux Caniche appuie dessus, ce ne sont pas des portes classiques qui s’ouvrent mais ce qui ressemble à une session. Tous nos compagnons se retrouvent après un long couloir de démarrage dans un gigantesque bureau de réception, entièrement tapissé de peaux de dalmatiens, décoré de quelques icônes et percé de fenêtres aux vitraux style « Windows PX ».

Le Vieux Caniche qui les guide se dirige vers le centre de la pièce, où nos héros distinguent progressivement une petite tache brillante. À leur grande surprise, il s’agit d’une véritable puce protégée par une carapace en or. La plus vieille puce du monde.

Après les présentations d’usage et autres bavardages protocolaires, nos amis posent leurs questions concernant le rapt des Druides. La Puce réagit en éclatant de rire et en vociférant avec sa voix de vieille puce. « Depuis que je suis née, on se moque de moi, on me piétine. Or voilà que maintenant je suis au cœur de tout, au cœur de tous les systèmes, de tous les réseaux, de tous les hardwares, de tout le savoir. Je suis supraconductrice ; je conduis tout, tous les destins de la Terre et je ne vous dirais rien. Je ne vous ouvrirais pas ma mémoire vive ! »

C’était sans compter sur le hasard, capable de retourner bien des situations et autres scénarios bien ficelés. Didactix qui a attrapé pendant le voyage, à cause de la climatisation du train, un tout nouveau rhume de type troyen, éternue sans le vouloir sur la Puce.

Celle-ci qui riait encore se met subitement à tousser et à transpirer, contaminée qu’elle est par le virus troyen de Didactix. Elle est prise de spasmes. Syndicaline a alors l’idée de reposer les questions sur le rapt de nos druides. Une très bonne idée puisque dans ses convulsions, tout en les traitant de « Pirates ! », la Puce imprime sur l’un des kleennix de Didactix, les précieuses informations recherchées par nos amis. Puis la Puce se met à hurler de plus en plus fort. De la bave de silice corrosive se met à remplir toute la pièce. Entendant dans le couloir le pas de course du féroce service d’ordre et de l’impitoyable service d’administration réseau, nos héros se sauvent en fermant sur eux l’une des fenêtres.

Une fois à l’abri, ils déchiffrent sur le kleenix de Didactix « allez vers la rue de la couronne en fuite et vous trouverez vos Druides dans les cryptes du donjon baptisé Communicatium. »

Pour ceux qui s’inquièteraient pour la Puce Dorée, rassurez-vous ! La Puce s’est auto-sauvegardé grâce à un download raëlien avant de se réinitialiser, retrouvant ainsi son orgueil d’avant l’attaque virale. Par contre si certains d’entre vous voulaient la voir, ce sera maintenant beaucoup plus difficile. Elle se protége derrière un mur de feu supranaturel.

dimanche 21 décembre 2008

CHAPITRE 1 LE RAPT (3/4)



Revenus au cœur de Lutetia et une fois arrivés rue de la Couronne en fuite, nos camarades découvrent qu’un donjon très bien gardé jouxte le palais qu’occupe Girondix. « Notre druide doit être là-dedans. Toutefois comment va-t-on faire pour le délivrer ? » Se demandaient-ils.

Le Vieux Pigeon de la Sorbonne, qui les accompagne toujours, se propose de rechercher Constitutionnix, de le prévenir que ses amis sont là et de revenir avec des informations. Après s’être glissé par une fenêtre entrouverte, avoir descendu d’interminables escaliers et s’être battu contre les rats des couloirs de la crypte du donjon, notre Vieux Pigeon finit par trouver Constitutionnix. Un Constitutionnix très affaibli mais au combien heureux de savoir que ses amis sont là.

Après les bavardages introductifs habituels, Constitutionnix indique au Vieux Pigeon qu’il serait bon que ses amis interviennent cette nuit même car il s’agit d’une nuit sans lune pendant laquelle il pourra tenter de les aider. C’est avec un grand soulagement et une très grande joie que nos amis reçoivent toutes ses informations.

La nuit venue, ils s’aperçoivent en effet, que la Lune est éteinte et qu’un brouillard druidique, compact et glacial se repend. Les dieux sont avec eux. Les dieux ont entendu l’appel du bon druide.

Les gardes au sang reptilien ne résistent pas longtemps au sang-froid des éléments. La plupart d’entre eux rentre aux abris. Les plus résistants restent pour maintenir un service de garde minimum.

Alors qu’ils réfléchissent à comment neutraliser les derniers vigiles, Didactix se rend compte qu’il est assis sur une caisse, tombée visiblement d’un camion militaire, estampillée «Achtung, Munitionum ». Il l’ouvre et découvre qu ‘elle contient des études d’opinion.

Didactix a une idée suivie d’un long moment d’hésitation. Tout écrit se doit d’être respecté et ne pas servir d’arme de jet. En réfléchissant il se souvient cependant d’une vieille jurisprudence : «Considérant qu’un prospectus publicitaire reste un prospectus, même s’il prend des formes livresques, vu qu’il n’est pas œuvre de savoir. Considérant que tout prospectus publicitaire a la poubelle pour destination finale; toute réclame qui peut être jetée peut donc servir d’arme de jet. » (Cours de Cass. morale, n°146-952 ; ifopipeau contre bibliothèque de quartier )

« Alors, t’as fini ou quoi ? Que fait-on ? Noms des dieux ! » Se permet une Syndicaline gelée après une heure d’attente silencieuse dans le brouillard glacial. « Je déteste quand tu rentres dans tes interminables catalepsies socratiques, pendant lesquelles il ne faut surtout pas te réveiller ». Didactix, lui sourit et lui dit qu’ils vont pouvoir passer à l’attaque. Pendant que Syndicaline montera à l’assaut de la forteresse, Didactix se servira du poids des mots pour le choc des paupières.

« Je vois que me revient encore le privilège de me jeter dans la gueule du loup » maugrée Syndicaline.

« Que veux-tu, t’es la seule d’entre nous à avoir été trotskiste dans ta jeunesse. Il faut bien que les techniques d’entrisme et d’infiltration que tu y as appris, servent au moins à quelque chose de concret » lui répond un Didactix goguenard.

« Mouais, quelque chose me dit que je paierai toute ma vie cette stupide erreur de jeunesse » conclu Syndicaline.

Et il en va ainsi. Didactix, en couverture, assomme à coup de pavés sondagiés tout garde qui se montre. Quant à Syndicaline, elle se glisse, s’immisce, se faufile, jusqu’à la crypte des cachots, tantôt jouant le personnel de maison, tantôt la conseillère technique, tantôt la secrétaire particulière. Tout un art que celui du camouflage trotskiste.

Une crypte où elle découvre une odeur familière. « mais ça empeste le flan, ici ». Effectivement, dans la crypte de Communicatium, dégouline de partout une sorte de gélatine à la forte odeur de flan. N’y résistant pas, elle se risque à goûter la gélatine en question. « Il n’y pas de doute, c’est du flan. Tout ici est à base de flan, les murs, le sol, le plafond ». C’est dans cet environnement étrange qu’elle ne tarde pas à découvrir la geôle de Constitutionnix, qui la guidait télépathiquement par voie d’ondes courtes.

« Il n’y a pas un instant à perdre, mes pouvoirs s’amenuisent de minute en minute. Il me faut tenter de geler tout ce flan avec ce qu’il me reste de fluide magique pour que tu puisses essayer de briser la porte ».

« Surtout pas, cher Constitutionnix. Le flan ne gèle que très difficilement grâce à ses particularités moléculaires. Qui plus est, toute la structure risquerait de s’affaisser sur nous. Laisse-moi faire, mon bon druide. Tu as devant toi une championne universitaire de gobage de flanby. grâce à ma technique spéciale du escaping-flanby, en gobant aux bons endroits, sans toucher aux flanbys angulaires comme de voûte, je devrais pouvoir gober ce qu’il faut pour qu’on puisse te sortir de là ». Gobage que Syndicaline accompli magistralement.

Après avoir aidé le druide à s’extirper par le passage créé par voie de gobage, elle retrouve Constitutionnix encore plus épuisé que ne l’avait trouvé le Vieux Pigeon. Ses derniers efforts l’ayant totalement vidé. « Tiens bon Constitutionnix. Tiens bon, j’ai besoin de toi pour m’aider à libérer les autres Druides et pour nous faire sortir d’ici avec les quelques grammes de poudre d’escampette que j’ai ramenée avec moi ».

« Ne t’inquiète pas mon enfant, libéré de l’emprise du flan qui absorbait ce qui me restait de pouvoirs, je vais pouvoir nous fagoter au moins deux trois sorts de dissimulation. Pour les autres Druides, nous ne les trouverons plus ici ».

Syndicaline et Constitutionnix retrouvent le Vieux Pigeon ainsi que Didactix à l’extérieur. Ce dernier est surpris de ne pas les voir accompagnés de tous les autres Grands-Druides. « Je vous expliquerai tout ça, une fois au village. Rentrons vite, de grands dangers nous menacent. »

Après avoir dit ça, le vieux Druide n’a que le temps de s’asseoir dans le Taxi, hélé par Didactix, avant de s’enfoncer dans un profond sommeil. Le Taxi prend la direction de la Gare du Mont Parnax. Par chance ils n’attendront pas longtemps le premier train du matin. Arrivés au Village, Constitutionnix dort toujours. On le porte chez lui où il dormira 48 heures d’affilées. 48 heures pendant lesquelles nos héros veillent sur lui. Staracademix se proposant même de composer une chanson aux pouvoirs guérisseurs. On lui explique gentiment que ce n’est pas le moment pour les conneries.

vendredi 19 décembre 2008

CHAPITRE 1 LE RAPT (4/4)



Les 48 heures se sont écoulées. Le bon druide se réveille. La fée Christine, sa douce fée de compagnie, lui prépare avec amour et lui sert son petit-déjeuner favori: un cocktail de jus de fruits bio multi-vitaminés ; ses galettes pur-beurre de DHEA, une huile druidique aux pouvoirs régénératifs, et du bon bacon de sanglier « serano », accompagné de pain druidique. Du bon pain à base de farine de glands car puisque tout est bon dans le cochon, ce que mange le cochon l’est forcement.

Tout en mangeant, il leur raconte ce qu’il vécut et apprit pendant ses mois de captivité dans les gluantes geôles de « Communicatium. »

« Le premier mois, nous étions tous enfermés dans la même cellule. BadBercix le Grix logeait lui dans le Donjon qui surplombe les cachots, lieu où il travaillait avec Girondix à l’élaboration des plans de campagne de Démagogix. Apprenant cela par ces bavards esprits que sont les Bruits-de-couloir, nous avons demandé aux petites souris du cachot de bien vouloir espionner pour notre compte les conversations comme le contenu des plans. C’est ainsi que nous découvrîmes une partie des projets maléfiques établis par Girondix et son fidèle lieutenant BadBercix le mage des mesures. Les projets qu’ils préparaient malicieusement contre Belle France. Les invocations de BadBercix, entendues avant mon départ, n’étaient pas qu’un piège pour m’inciter à réunir en urgence le Grand Conseil au complet ».

« Parmi ces projets, Girondix mettrait tout en œuvre pour fournir au sombre Baron Wendelium trois grands marteaux en or massif. Des armes magiques que ses ancêtres ont déjà utilisées en des temps immémoriaux pour faire plier la volonté populaire, avant qu’elles ne se retournent contre eux. Des marteaux qui ne peuvent être fabriqués que par les filles du Dieu forgeron, les filles des forges, Usinoria, Saciloris et Alstomia. Divinités qui en plus d’un précieux élixir à base de sueur de travailleur, ont besoin d’enchaîner le Soleil de l’aurore quelques instants, tous les jours, afin de lui voler un peu de son feu sacré, pour pouvoir fondre et travailler l’or du cœur de la Terre ».

« Vous imaginez bien, vous qui êtes des êtres sages, que pour enchaîner le grand dieu Belenos quelques instants, il faut déployer des incantations extrêmement puissantes, des sorts nucléaires très dangereux. Or tout druide physicien qui se respecte connaît l’éternelle Loi de l’action-réaction. Tout sort a pour écho son contre-sort. Et plus le sort est puissant et plus l’écho l’est d’autant. Mais ces pauvres fous se moquent de la sagesse. Seul leur soif démesurée, leur égoïsme, l’individualisme les guide et les motive ».

« Ainsi, les sorts furent jetés, jetés au visage du firmament », nous dit avec gravité Constitutionnix.

« BadBercix et les autres mages des mesures, sous les ordres de Girondix, lancèrent toutes les nuits qui suivirent notre capture, depuis la plus haute tour du palais, des formules telles que "Usinoria, Saciloris, Alstomia… Nous vous offrons l’augmentation du temps de travail… La précarité… Les délocalisations… La rente financière… Accordez-nous les trois marteaux-pilons qui font plier les volontés… À commencer par celle du Soleil" ».

« Bien qu’enfermés dans notre cachot, matelassé de flan absorbant, nous percevions ces sorts puissants. Des sorts que nous tentions de contrer en fusionnant nos pourvoir pour lancer des contre-mesures telles que "Sol invictus, Belenos invictix…France…Belle France de la République…Ta devise est Liberté, Egalité, Fraternité… Ton principe est gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple … Que l’Esprit de Lumière reste ton frère… Qu’il brille pour nous tous" ».

« Toute la nuit, toutes les nuits nous combattîmes ainsi, jusqu’au jour où les mages de magie sombre, membres de l’ordre des caisses occultes, cherchèrent des causes à l’échec de leur invocations et perçurent enfin nos propres contre-mesures. Ils étaient surpris. Ils pensaient en effet que leurs murs de flan annuleraient tous nos sorts de vérité. Les voilà touchés dans leur orgueil. BadBercix, leur chef, réagit en faisant en sorte que nous soyons séparés les uns des autres. J’ignore par conséquent où sont mes pairs ».

« Diantre, diables et lutins ! La guigne ! » Grogne Didactix en y pensant. Comment retrouver les autres Grands-Druides maintenant que la Puce qui sait tout s’est retranchée derrière son « Fire-Wall » magique.

« Mais ce n’est pas tout », poursuit Constitutionnix.

« Avant de nous expédier loin les uns des autres, Girondix me rendit visite dans mon cachot pour m’y infliger une blessure supplémentaire. Il commença par tenter de me séduire avec des mots parfumés de miel et de lavande. Il échoua. Je ne me laissais pas, bien évidemment, tromper par ces senteurs. Bien que fatigué, je voyais clairement les sornettes et autres couleuvres qui sortaient de la bouche du Bossu en sifflant ».

« Prenant conscience de son incapacité à me tenter, il finit par m’ordonner de me mettre à son service. Demande qui fut accueillie par une fin de non-recevoir, étant donné que je n’avais rien à lui offrir, ni à lui, ni à ses maîtres, pauvre esclave qu’il était ».

« C’est alors, un sourire narquois accroché aux lèvres telle de la morve acide, qu’il me bava dessus les mots suivants : Oh ! que si, pauvre fou. Tu as bien des choses à m’offrir. Ne me sous-estime pas Constitutionnix. Je sais qui tu es et les pouvoirs que tu détiens. Tu commandes à des armées noosphériques. Tu as hérité du pouvoir des mots dorés or je veux ce pouvoir ».

« Ce à quoi j’ai répondu "Mes armées de lettres dorées ne seront entre tes mains que de vulgaires soldats de plomb". Une réponse qui en appela une autre bien plus brutale. Me souriant, Girondix me rétorqua la chose suivante ».

« Je me contenterai de mots de plomb, vieil alchimiste de la parole. Je n’ai pas de temps à perdre et je ne te laisse pas le choix. Tes confrères sont en mon pouvoir et je n’ai pas besoin d’insister sur le fait que je n’hésiterai pas à les dissoudre dans l’oubli. Tu es suffisamment intelligent pour reconnaître ta défaite et trop stupide pour me laisser faire une chose pareille »

« La sentence fut sans appel et ma défaite bien cruelle, mes chers enfants. Ce monstre de Girondix vampirisa l’essentiel de mes pouvoirs. J’en suis désolé. J’en suis profondément désolé », insiste Constitutionnix en conclusion du récit de sa captivité.

« C’est un druide affaibli et bien pauvre en magie désormais, que vous avez secouru. Je n’ai plus à vous offrir que quelques sorts, un peu de savoir et les conseils d’un vieux fou ».

« Nous n’échangerions cela contre aucune armée de mots ou de tout autre ordre. C’est toi que nous voulons à nos cotés » lui disent en choeur Syndicaline et Didactix.

Heureux de cette marque d’amitié, Constitutionnix termine son repas en disant que l’on n’a, de toute façon, plus le temps de partir à la recherche des autres druides. « Nous devons nous préparer ». Se préparer car les troupes ennemies se préparent, elles aussi, pour la campagne post-électorale.

« Comment Girondix a-t-il vampirisé les pouvoirs de Constitutionnix », me demanderez-vous. Une curiosité fort légitime que j’étancherai un peu à l’écart de notre bon Druide puisque vous aurez compris qu’il n’est pas capable de vous parler, pour l’instant, de ce souvenir douloureux.

Après que Girondix lui a ordonné de lui remettre le pouvoir des mots d’Or, Constitutionnix lui dit « Puisque tu veux ce pouvoir, le voici ». Puis le druide tendit ses bras en direction de Girondix. L’atmosphère devint humide et lourde, comme chargée d’électricité. Une odeur de mercure et de cyanure se mit à flotter. Constitutionnix se mit à trembler violemment. Sa sueur ruissela jusqu’à ses pieds. Là, sur le sol, les gouttes formèrent des billes liquides qui se mirent à rouler vers le bossu pour finir par reformer une flaque sous ses pieds.

Alors que Contitutionnix tendait toujours ses bras parcourus de spasmes vers Girondix, une brume épaisse aux reflets dorés s’extirpa par les pores de la peau et le bout des doigts du druide. Ses ongles tombèrent. Le druide gémit ; le bossu sourit.

La brume se fit de plus en plus compacte, finissant par former dans l’espace de magnifiques entrelacs, si denses que l’on aurait dit les entremêlements des branches de l’If. Des entrelacs où des lettres ogamiques apparurent, accompagnées d’un bruit sourd, comme celui d’encoches que l’on frapperait sur du bois.

Ces lettres d’or, filles du silence, finirent par se détacher des entrelacs et par se précipiter vers la bouche et les narines de Girondix qui les accueillit en riant. Les entrelacs gémirent telle l’écorce d’un arbre que l’on déchire ; le bossu sourit. Constitutionnix s’effondra et Girondix, dit Messire de la Bosse, quitta le cachot fier de lui.