dimanche 22 juin 2008

CHAPITRE 7 « LES RIVAGES DE L’INFRAMONDE » (1/5)


« C’est encore loin Grand Druide », s’exclame Cégétix impatient. « Oui, très loin ! » répond Constitutionnix agacé.

« Faudrait savoir alors ! », poursuit Cégétix. « C’est pas que j’en ai assez, c’est plutôt que j’en ai carrément marre ! Depuis ce matin, nous cherchons McAfyx en nous fiant à ton instinct et puis toujours rien. À chaque fois que l’on te demande si on chauffe, tu nous dis que oui et au final encore et toujours rien. On ne va pas tourner sans cesse à bord de ce maudit char jusqu’à la Fin de l’Histoire tout de même ».

« C’est vrai que l’on piétine un peu, Constitutionnix », se permet Syndicaline.

« Je te reconnais bien là, mon cher élève. Tu as toujours tenu à trouver par toi même les solutions aux problèmes mais ne faudrait-il pas envisager, une autre voie ? » dit Gutuaterix, le corbeau Albinos.

« Apparemment la majorité a parlé », conclut Constitutionnix. « Ne nous en veux pas Constitutionnix mais nous aimerions bien débusquer l’épée magique le plus vite possible », tempère Didactix, après avoir remarqué les sourcils froncés du vieux Druide.

Le visage de Constitutionnix se détend. Le vieux sage se caresse la barbe puis sourit. « Il est vrai que je m’entête », dit le druide, « l’âge sans doute ! ». Il vient à peine de finir le dernier son du mot « doute » qu’il se claque le front.

« Par Belenos, Teutatès et Lugh, Je l’avais complètement oublié celui-là », se dit-il. Tous nos camarades le regardent interrogateurs. « Nous n’aurons pas à attendre la Fin de l’Histoire pour trouver notre homme. Il suffit d’aller voir ce bon vieux Huguix les Bons Tuyaux, un vieux barde de mes amis que j’ai perdu de vue depuis bien longtemps. Je me disais bien que les terres de Lexobie ne m’étaient pas inconnues. Huguix m’a écris il y a quelques années pour me dire qu’il s’était installé ici, prés du temple Lughien d’Anticipa ».

Tout le monde sourit de soulagement. L’aventure va pouvoir continuer. Constitutionnix les met toutefois en garde. « Si je peux trouver Huguix les Bons Tuyaux, ne vous emballez pas pour autant. Là où nous allons, le calme sera notre meilleur allié. Ne confondez jamais vitesse et précipitation ». Puis le vieux druide indique à Syndicaline qu’il faut demander au diablotin de les conduire vers la côte car au coucher du disque solaire, Huguix s’en va toujours vers les rivages chanter une berceuse afin que Belenos trouve repos et calme dans les bras de l’océan.

Ils le trouvent effectivement sur une plage, une harpe celtique coincée entre ses deux genoux. En fait, il ne chante pas une berceuse. Pas cette fois-ci.

« Seul sur le sable, les yeux dans l’eau, mon rêve était trop beau. L’été qui s’achève, tu partiras, à 100 000 lieus de moi… »

« 100 000 lieues, c’est beaucoup tout de même !» reprend Cégétix. « Cela doit faire au bas mot la distance Terre Jupiter. C’est pas possible ton histoire ! Il va falloir changer les paroles. »

Huguix se retourne tout courroucé dans la direction du guillotin artistique, prêt à lui rétorquer, qu’il s’agit là d’une vieille balade acadienne qui d’ordinaire parle aux êtres sensibles, ce qui ne semble pas être son cas. Mais au lieu de répondre, il sourit. Aux côtés de Cégétix, il a reconnu Constitutionnix.

Après les embrassades et autre présentations d’usage, le vieux druide explique à Huguix les raisons de leur venue. Huguix les Bons Tuyaux se propose bien volontiers de les mener à McAfyx le Pirate dont il connait effectivement le repère. Il le fait avec d’autant plus d’entrain qu’il se lamente auprès de Contitutionnix de se sentir bien seul. L’ennui est sa seule compagnie. Plus personne ne lui demande de conter les histoires ancestrales ou de chanter les chansons éternelles. Tout est désormais téléchargeable sur La Toile. La Puce Dorée dispense tout, vérités et mensonges, savoirs et plaisirs. La petite Puce Dorée est devenue la grande aragne de la Toile. Constitutionnix tente de le consoler en lui disant qu’il faut bien s’adapter au cycle des saisons, apprendre à surfer sur les vagues du temps, saisir les outils du moment afin de faire fructifier un héritage ; et en lui démontrant également qu’il y aura toujours de la place pour les mémoires vivantes et les sentiments. Rien n’y fait, Huguix les Bons Tuyaux semble prisonnier d’une grande mélancolie. Le lendemain matin, mélancolie ou pas, il les conduit vers la tanière de McAfyx.

jeudi 19 juin 2008

CHAPITRE 7 « LES RIVAGES DE L’INFRAMONDE » (2/5)


Et effectivement, McAfyx se trouve bien là, comme l’avait indiqué Loanamélusine, à proximité du temple de Lugh. D’après Huguix les Bons Tuyaux, McAfyx serait le seul élève d’Epitae le Parisi, un autre grand-maître de la Toile, à avoir franchi le grand océan, traversé la Grande Vallée des Puces et à en être revenu indemne. On prétend qu’une fée, la Fée Pachier, lui avait offert avant son départ une paire de lunettes à double foyer magique, ce qui lui avait permis de demeurer vigilant et lucide. C’était bien lui, McAfyx au visage gracile, au teint d’albâtre, lézardé d’une étrange cicatrice, et portant les cheveux longs ; McAfyx à la rétine écarlate et à la cornée diaphane. Il jouait en réseau, assis, concentré sur l’un des multiples écrans d’ordinateurs présents dans sa cybertanière baptisée « Atlantis d’Arcadia ».

Notre petite troupe n’a pas fini d’entrer dans la cybertaverne que McAfyx se lève et se dirige vers eux. « Alors comme ça, vous me chercher. Ne soyez pas étonnés mais mon Newsgroup m’a prévenu que vous cherchiez un maître de la toile afin de vous guider », dit-il plein d’assurance en même temps que sa balafre sourit de satisfaction.

Constitutionnix sourit lui aussi pendant que le reste de la troupe sourcille exclamatoirement. « En effet, nous te cherchons », dit le druide, « et puisque tu sembles si bien informé, ce sera du temps de gagner dans la poursuite de notre mission ».

« En route ! » claque McAfyx à la manière d’un ordre. C’est d’ailleurs le cas puisque nos compagnons voient trois autres jeunes araignées du Net décrocher leur nez des écrans et se lever. Il s’agit de Wifix, Atarix et Joystix, les trois fidèles acolytes du Pirate.

Le commando de l’infra-monde, au grand complet, avec ces neufs membres, peut enfin se mettre en route ; Huguix marchant mélancolique, McAfyx sur de lui, Joystix rigolard, Atarix observateur, Wifix faisant plus ample connaissance avec ses nouveaux compagnons, Cégétix déterminé, Didactix curieux de la suite des évènements, Syndicaline un peu inquiète et Constitutionnix pensif portant Gutuaterix perché sur son épaule.

Pourquoi Syndicaline est-elle inquiète, me demandez-vous ? Pour rien de trés grave, rassurez-vous. Maintenant que le chemin se fera à pied, elle a dû garer son char magique devant la cybertaverne. Or ne connaissant pas trop le coin, elle a quelques craintes pour le véhicule de Syndicalix et son diablotin.

« Avez-vous le cédérom magique ? » demande McAfyx impassible. Surpris, Didactix sort la galette numérique de l’une de ses poches, en rougissant pendant un court instant, l’image de sa jolie fée lui traversant l’esprit. « Oui !» Dit-il pour finir.

« Il ne nous reste plus qu’à trouver l’ordinateur maître du labyrinthe Call Centrum », poursuit McAfyx tout en entraînant la troupe sur un chemin qui les éloigne du centre de recherches, le centre cultuel de la Lughopôle.

« Le maître ordinateur n’est pas dans le sanctuaire ? » Demande Constitutionnix. « Non ! Le sanctuaire est en libre accès. C’eût été trop dangereux de l’y laisser » répond McAfyx, un peu méprisant devant ce qu’il estimait être une lacune de ne pas savoir cela pour un druide de ce rang. Constitutionnix sourit. « On a préféré l’installer au centre du labyrinthe, dans un endroit bien mieux gardé et plus repoussant comme vous allez pouvoir vous en rendre compte » , explique McAfyx.

« Nous y voilà ! » reprend McAfyx après une marche de plusieurs centaines de mètres. « Voici le Call Centrum, le terrible labyrinthe gardé par Minotaure-le-Supervisor. Mais n’ayez crainte et surtout laissez-moi faire ! » Constitutionnix sourit une fois de plus. Le reste de la troupe remarque interrogative l’inscription en lettres d’or sortant de la bouche d’un caïman, et qui figure sur le fronton du Call Centrum. « Votre labeur fait notre liberté ».

Après avoir caché Gutuaterix, le corbeau albinos, dans une boite à outils, ils passent la gigantesque porte monumentale de verre et d’acier, tous alignés derrière McAfyx le Pirate. Quel étrange spectacle ! Leur regard ne parvient pas à se fixer, rebondissant, tournoyant puis se perdant devant l’étendue des couloirs et la multitude d’alvéoles accrochées à ceux-ci. Dans les alvéoles les plus proches, présentées comme des postes de travail par McAfyx, s’y trouvent attachées à des ordinateurs par leurs oreilles droites, rouges et hypertrophiées, des essaims d’e-ouvrières, chargées d’e-convaincre, frénétiquement, des e-consomateurs, choisis par l’ordinateur qui leur sert de contremaître.

Nos amis finissent par braquer leurs yeux éberlués sur McAfyx. Comment vont-ils bien pouvoir retrouver le Maître Ordinateur dans ce dédale qui semble s’étirer à l’infini ? « Rassurez-vous ! Le réseau a été installé par des amis au service d’Arianne2i. Nous n’aurons qu’à suivre le fil bleu, la fibre optique qui relie tous les ordinateurs esclaves à l’ordinateur maître. » Mais avant ça, il va falloir affronter l’imposante masse du Minotaure qui se dirige vers eux à cet instant. « Laissez-moi faire ! » Conclut McAfyx.

mercredi 11 juin 2008

CHAPITRE 7 « LES RIVAGES DE L’INFRAMONDE » (3/5)


Oui mais faire quoi ? C’est que Minotaure-le-Supervisor est gigantesque et arbore un air particulièrement sévère. Détail presque amusant, deux antennes un peu comme celles d’une fourmi, qui sont en fait des oreillettes, semblent se trouver visées à ses oreilles. Elles lui permettent de surveiller les échanges télémarketings menés par ses e-ouvrières. L’observant, Didactix se dit « les fourmis ont des transmetteurs olfactifs, nous avons désormais les nôtres pour les ondes ».

Le Minotaure se trouve maintenant devant eux. McAfyx le Pirate se présente comme un administrateur réseau de chez Ariane2i. Il aurait été appelé suite à un problème de serveur. « Et me voilà, avec toute mon équipe technique ! » Conclut-il tout en présentant un faux bon de commande. Le Minotaure lui fait savoir qu’il n’a pas été connecté à cette donnée or il déteste ne pas être au courrant de ce genre de choses. C’est qu’il en va de sa stature de Supervisor.

McAfyx explique qu’il faut de toute urgence renforcer la protection du réseau et améliorer le débit du service sans quoi ils risquent de se retrouver à la merci du premier pirate venu ou pourraient avoir du mal à faire face à un éventuel surcroît d’activité. Minotaure fronce les sourcils mais les deux arguments magiques, menace et rentabilité, ont fait mouche. Nos amis se mettent en marche derrière McAfyx qui pendant la discussion avait repéré le fil bleu d’Ariane2i.

Le Minotaure les laisse passer, bien que ses sourcils demeurent figés dans une expression dubitative. Ses antennes de fourmi soldat s’agitent comme si elles percevaient un danger. Un doute le tenaille. Il s’apprête à les rappeler lorsque son oreillette s’alarme. L’instant d’après il hurle dans le transmetteur, en forme de mandibule, placé devant sa bouche, « numéro 365, 20 euros de déduits sur votre prime accueil ! Cela vous apprendra à dire au revoir au lieu d’à bientôt au client-pigeon-roi ! »

McAfyx et son équipe se dépêchent de suivre la fameuse fibre optique, le long d’allées aux zigzags interminables au cours desquels Cégétix observe la présence de jeunes visages, tous similaires, aussi fatigués qu’hypnotisés par ces écrans d’ordinateur.

« Voilà le local ! » s’écrie Joystix. « Au boulot ! » enchaîne McAfyx. Wifix est chargé de surveiller l’entrée du local où se trouve le serveur central, l’Ordinateur Maître. Précaution utile car au loin, Wifix peut d’ores et déjà deviner que les deux antennes du Minotaure se dirigent vers eux. « Dépêchez-vous ! » dit-il.

Le cédérom gravé de runes oghamiques est introduit dans le lecteur qui se met à tourner plus vite que d’ordinaire tout en produisant des bruitages inhabituels. Finalement le bruit s’arrête mais rien n’apparaît sur l’écran. Aucun icône ne s’affiche, aucun programme ne se lance. Alors que McAfyx s’apprête à pianoter sur le clavier une formule numérique dont il a le secret, l’ordinateur s’éteint brusquement puis redémarre.

« Crotte de puce, nous allons nous faire repérer ! Nous avons dû planter tout le réseau ! » S’exclame Joystix. Effectivement, une rumeur plaintive monte depuis les alvéoles du labyrinthe. Puis celle du Minotaure qui rugit, les traitant tous d’incapables. Wifix qui fait toujours le guet insiste pour que l’on se dépêche. Au loin, il observe que le déplacement des antennes du Minotaure s’est accéléré.

McAfyx qui n’a pas quitté l’écran des yeux voit défiler des lignes de codes étranges jusqu’à ce que l’interrogation « Password » s’affiche à l’écran. « Comment ça mot de passe ?!? » s’interpelle toute la troupe en se tournant vers Didactix et Constitutionnix. Didactix hausse les épaules. Il ne sait pas quoi répondre. Constitutionnix demande à McAfyx de taper le mot « Samain », le nom de la fête qui a lieu selon l’ancien calendrier entre le 31 octobre et le 1 novembre, moment où les portes de l’inframonde s’ouvrent. L’ordinateur piaille. Cela ressemble à un piaillement positif. Tout le monde soupire de soulagement. Mais la formule « Date Error » apparaît à l’écran. Tous les visages, y compris celui de Constitutionnix, se crispent à nouveau tout en expirant un « comment ça, erreur de date ?!? ».

« Mais bien évidemment ! », s’écrie McAfyx, « Nous sommes en plein mois du travail (mai selon l’ancien calendrier) et non pas à la fin de celui des vendanges (octobre) ! Ça ne peut pas fonctionner ! » Il prend immédiatement la souris, déplace un curseur en forme de petit dragon et clique sur le coin supérieur droit de l’écran. Il reconfigure ainsi l’horloge de l’ordinateur en entrant la date du 31 octobre puis actionne la touche « Entrée ».

« Grouillez-vous ! » lance Wifix, le front en sueur. « Ça vient ! ça vient ! » Répond McAfyx. Il tape de nouveau le mot « Samain » et réappuie sur la touche « Entrée ». Le lecteur de cédérom se met alors à tourner furieusement, faisant un boucan de tous les diables. Maintenant c’est au tour d’une fumée compacte de s’échapper par les interstices du lecteur.

Les regards s’affolent. Constitutionnix tente de les rassurer en expliquant qu’il s’agit des nuées de l’inframonde pour la bonne raison que la fumée a l’odeur du gui fraîchement coupé plutôt que celle de composants électroniques en train de griller. Mais les propos du druide ne les calment pas vraiment. En fait, ils ne savent plus ce qui les affole le plus, l’arrivée imminente du Minotaure ou les nuées de l’inframonde. Le brouillard a envahi toute la pièce. Un Triskèle doré et extrêmement brillant emplit l’écran. « Posez vos mains sur l’écran », leur demande alors Constitutionnix. « Wifix ! Amène-toi ! » Ordonne McAfyx.

« Quelle bande d’incapables ! Quelle odeur nauséabonde ! Mais où sont-ils passés ! » Hurle le Minotaure en entrant furieux dans le local informatique tout en essayant de chasser la fumée avec ses deux mains énormes.

lundi 9 juin 2008

CHAPITRE 7 « LES RIVAGES DE L’INFRAMONDE » (4/5)


Toute notre petite troupe se trouve maintenant dans l’inframonde. Mais ils n’ont pas le temps d’ouvrir les yeux qu’un cri horrible leur vrille les oreilles. Leur premier geste consiste donc à se les boucher. C’est le cri de la plus vieille Puce du monde, la Puce Dorée. Elle a détecté leur passage à travers le portail numérique et hurle de frayeur, de peur qu’ils la retrouvent. Finalement, elle se met à l’abri dans un fichier caché et cesse de hurler. L’alerte passée, ils observent leur nouvel environnement.

Une toile arachnéenne numérique, aux mailles épaisses, tapisse l’horizon à l’infini. Au-dessus comme en dessous, des textes, des images, des spams, défilent en permanence. Une lumière phosphorescente, comme celle que produiraient des milliers d’écrans d’ordinateurs dans un gigantesque hangar ténébreux, éclairent leurs déambulations. Où sont-ils et surtout où aller ?

Alors que Constitutionnix libère Gutuaterix de la boîte à outils où il se trouvait jusqu’à présent, McAfyx se met soudainement à sautiller puis à bondir sur les mailles de cette toile qui leur sert de défilé aventureux. Les mailles ont beau être suffisamment larges, ce balancement n’est pas fait pour les rassurer dans ce lieu étrange. Ils se demandent si McAfyx est devenu fou et lui intiment l’ordre d’arrêter. McAfyx en souriant leur signifie de s’accrocher et de lui faire confiance. « La voilà ! » conclue-t-il.

Au loin, telle une locomotive s’avançant à grande vitesse sur un monorail, une masse grandissante s’approche d’eux. Ils finissent par reconnaître avec surprise les formes pixélisées d’une araignée-robot. Elle s’arrêta devant McAfyx. Elle n’a pas l’air menaçante ce qui déride un peu nos amis.

« Je vous présente Googlie », dit McAfyx, « notre arachnomoteur de recherche. D’ailleurs que cherche-t-on ? ». « L’épée au nom de tonnerre pourfendeuse d’injustices » répond Didactix. « Non, Grwéve Gwenwéralh, elle s’appelle Grwéve Gwenwéralh » précise tout excité Cégétix. Les autres le regardent d’un air circonspect.

McAfyx qui parle aussi bien le Java que le Basic, demande à Googlie de les conduire vers l’épée « Grwéve Gwenwéralh », en lui glissant des mots clés à l’oreille. « Aucune page ne correspond à votre requête » répond Googlie en Javanais. McAfyx se tourne vers Cégétix en lui demandant s’il est sûr de lui. « Oui, tout à fait, vous verrez bien de toute façon lorsque l’épée répondra à ce nom ». Contitutionnix indique alors à McAfyx d’essayer la formule de Didactix « L’épée au nom de tonnerre pourfendeuse d’injustices ».

Ça fonctionne. L’araignée numérique fait signe à tout le monde de monter sur son dos et de s’accrocher fermement aux différents capteurs qui s’y trouvent. Elle se met en route. À toute vitesse, elle saute de maille en maille, de fil en fil, de texte en texte, d’image en image, évitant les publicités, les spams et les autres détritus de la toile. Tout cela leur donne le fameux tournis numérique, le mal du cybair. Et ce n’est qu’un début puisque au détour d’un lien hypertexte, il arrive à Googlie de virer brusquement, leur faisant encaisser des grandes quantités de G haut débit. Ce faisant, le sang irrigue mal les cerveaux ainsi que les rétines. Le voile rouge et le voile noir les menacent. Certains sont au bord de la perte de conscience. Un arrêt brutal met fin à ce grand huit numérique. Constitutionnix vomit.

Catastrophe ! Les huit pattes de Googlie sont engluées dans la toile. À tel point qu’elle ne se débat même pas, n’exprime plus rien. Complètement inerte, la voilà scotchée à la toile par un virus collant. C’est là qu’un « Vengeance ! » se fait entendre suivi d’un rire, résonnant au loin. Il s’agit du rire de la Puce Dorée. « Crotte de puce, nous voilà plantés » s’exclame Joystix. Que faire ? Tout le monde interroge McAfyx d’un geste du menton. McAfyx hausse les épaules, marquant ainsi son impuissance et sa rage. Ils ne peuvent même pas descendre de leur arachnomoteur de recherche sous peine de rester collés eux aussi à la toile. Gutuaterix exécute bien quelques cercles dans les airs, mais il ne sait pas où aller.

Alors que l’abattement les gagne, un éclair argenté se dirige vers eux depuis le firmament numérique à la vitesse d’un transfert par fibre optique. « Ouah ! » s’exclament McAfyx, Wifix, Joystix et Didactix. Ils viennent de reconnaître un héros mythique, un super héros venu du fin fond de la Galaxie, emprisonné à jamais sur Terre par Galactus, le Titan mangeur de planètes. Il s’agit du Silver surfer, soit le Surfeur d’argent. Le Surfeur d’argent, pour ceux qui ne le connaissent pas encore se trouve complètement enveloppé dans une substance argentée qui le rend invulnérable. Et il vogue librement dans les airs grâce à sa planche de surf cosmique. D’aucun prétendaient qu’il avait élu domicile dans le monde numérique où les victimes potentielles sont nombreuses. C’est vrai !

lundi 2 juin 2008

CHAPITRE 7 « LES RIVAGES DE L’INFRAMONDE » (5/5)


Arrivé à leur hauteur, il leur fait signe à tous les neuf de monter sur son surf qui s’allonge pour l’occasion. Puis sans mot dire, il propulse sa planche dans les airs. Wifix jette un dernier regard attristé sur Googlie. Sur le surf l’accélération est phénoménale et continue. Mais la vitesse se stabilise enfin après que le surf ait dépassé le mur de l’ADSL en zone dégroupée. Ils vont vraiment très vite, à plus de 10 mega-bites seconde, selon McAfyx. La vitesse est telle qu’aucun son n’est audible, ce qui évite au Surfeur d’Argent d’être assailli par tout un tas de questions.

Sous leurs pieds, la toile géante continue de défiler jusqu’au moment où Syndicaline tapote l’épaule de Didactix pour lui signifier de regarder devant lui. Ils se dirigent tout droit vers une gigantesque cascade verte de codes binaires qui couvre maintenant tout l’horizon depuis le firmament jusqu’à des abysses insondables. Constitutionnix qui vient de se rendre compte de cela aussi, se dit qu’il s’agit sans doute du fameux mur de Merlin, l’ultime rideau qui sépare de l’inframonde. À peine ont-ils le temps, par pur réflexe, de placer leurs bras devant leurs yeux, qu’ils l’ont déjà traversé. Tout éclaboussés de zéros et de uns, ils découvrent un environnement beaucoup plus familier, celui de l’océan ; de l’eau à perte de vue, un vent chargé d’embruns, des goélands qu’ils dépassent à une allure toujours aussi ahurissante.

Une île, au loin, n’a même pas eu le temps de sembler se dessiner que les voilà maintenant au beau milieu de celle-ci. De la lande et des bocages. À quelques dizaines de mètres devant eux, se dresse un Cromlech majestueux, comme celui de Stonehenge, à la différence près que celui-ci est formé de stèles verticales en argent massif et horizontales en or. Le surfeur leur fait signe de descendre, ce qu’ils font sans poser de questions. Il n’est vraiment pas bien loquace ce Super Héros. Wifix, Joystix, McAfyx et Didactix lui adressent, tout de même un sourire, en guise de remerciement.

Constitutionnix se met en route vers le Cromlech. La troupe le suit vers le sanctuaire circulaire. Alors qu’il était à son zénith l’instant d’avant, le soleil décline subitement. Il finit par se coucher dans l’exact alignement de la stèle la plus majestueuse. De son côté, la Lune émerge à l’exact opposé, une lune énorme, anormalement rousse et lumineuse. Au centre, un cristal de taille humaine semble attirer la lumière, la scinder et la redistribuer dans le cercle, de telle sorte qu’apparaît devant eux ce qui semble être un hologramme.

Constitutionnix et Huguix le reconnaissent tout de suite. Du gui grimpe le long de sa jambe droite, de la palmette pousse sous son pied gauche et deux dragons, l’un rouge, l’autre noir, voltigent au-dessus de lui. Constitutionnix indique au reste de la troupe qu’il s’agit d’une image du dieu Lugh, le vieux dieu polytechnicien. « Je le sais ! » fait McAfyx.

Syndicaline se trouve subjuguée par la lumière et par l’hologramme qui paraît de plus en plus réel. C’est peut-être bien lui après tout. Didactix frissonne sans comprendre pourquoi. Lugh semble heureux de les voir. Constitutionnix remarque que le regard du dieu s’attarde tout spécialement sur Didactix, un regard plein de tendresse que Didactix ne remarque pas. Constitutionnix comprend très vite pourquoi Lugh le regarde ainsi. Didactix est l’un des premiers bébés-éprouvette. Il est donc le fruit vivant de la technique, un enfant inspiré par Lugh, et par conséquent un peu l’un de ses enfants. Lugh les regarde tous fixement pendant un long moment sans rien dire. Personne n’ose parler, l’instant est magique. Il est vrai que l’on ne rencontre pas tous les jours une divinité placée à un tel niveau dans l’organigramme céleste. Lugh met fin à cette scène en tendant son bras droit vers l’Ouest, un bras qui semble démesurément grand, puis il disparaît. Nos amis ne remarquent pas la disparition du vieux dieu tout de suite et mettent quelques bonnes minutes à sortir d’une hébétude contemplative.

« Je crois qu’il faut aller vers l’Ouest », finit par dire tout doucement Constitutionnix. Le Soleil accueille cette initiative en rebroussant chemin vers son zénith. « Bizarre tout ça, non ? » dit Atarix.

Ils se mettent en route vers la côte ouest en se disant qu’elle sera longue. Mais bien que l’île leur avait semblé assez grande depuis là haut, sur le surf du Silver surfer, ils atteignent la côte ouest de l’île très rapidement. « Vraiment bizarre tout ça ! » Se dit encore une fois Atarix. « Le temps et l’espace semblent distordus », conclue-t-il. « Quantique ! » Précise McAfyx. Joystix, Atarix et Wifix s’esclaffent maintenant carrément. À peine venaient-ils de passer à côté d’un gros rocher que l’instant d’après, en se retournant, ils ne le distinguent quasiment plus, tant il parait être loin. Tout cela leur rappelle des soirées passées à trop tirer sur des pipes à marijuana.

Voici le rivage. Un bateau aux formes minimalistes apparaît tel un taxi que l’on aurait commandé. « Ça va flotter, ça ! » Lance Syndicaline, semblant regretter le char magique et son diablotin qu’elle avait pris en affection. Il est vrai qu’il ne s’agit pas d’un bateau ordinaire mais d’un Curragh, un vieil esquif gaélique des temps anciens, dénué de voilure et composé d’une ossature en bois de chêne enveloppée du cuir d’un quelconque sanglier sacré. Deux disques solaires en or brillent de chaque coté, ce qui lui donne un côté carriole qui fait sourire un peu plus Syndicaline.

Ils se décident néanmoins à le poser sur les flots et à grimper à l’intérieur. Huguix est le dernier à monter. Une grosse vague salue alors sa montée à bord en administrant une grande claque écumeuse sur la proue. Etrangement l’écume se fige et se transforme sous leurs yeux ébahis en cheval. Oui, un cheval d’écume s’attelle au curragh. Pourquoi pas après tout. Syndicalix disposait bien d’un diablotin tireur de char. Le curragh, tel un hors-bord illyrien fonçant sur l’Adriatique chargé de produits de contrebande, galope maintenant sur les vagues à vive allure.

(Plus que deux chapitres avant The End...)